Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/331

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parties du corps ; leur siège ordinaire est presque toujours sous la peau ; quelquefois elles vont plus profondément, & s’établissent dans l’interstice des fibres musculaires.

Les loupes ont reçu différens noms, relativement à la couleur des matières qu’elles contiennent, & aux parties qu’elles occupent. La loupe est appelée stéatome, lorsque la matière qu’elle renferme ressemble au suif ; quelquefois cette matière est liquide & jaune, & a beaucoup de ressemblance avec le miel, elle prend alors le nom de melliceris : elle est enfin connue sous le nom de goetre, (Voyez ce mot) lorsqu’elle est formée de chair, & qu’elle paroît au col.

La loupe, dans son origine, est d’un volume très-petit, & n’excède jamais la grosseur d’un pois, mais elle augmente insensiblement, & devient très-grosse, & pour mieux dire, monstrueuse. La loupe cède vacillement à la compression par laquelle on sent une fluctuation quelquefois sensible, & quelquefois très-obscure, & quoiqu’elle soit sans couleur par sa nature, néanmoins elle s’enflamme quelquefois, & alors elle devient très-douloureuse ; on y apperçoit de la rougeur, de la chaleur, & une démangeaison assez piquante.

La loupe se forme, comme nous l’avons déjà dit, dans les interstices des muscles, mais ce n’est que par la dilatation variqueuse des gros vaisseaux lymphatiques qui y rampent ; elle est le plus souvent unique & solitaire, mais il n’est pas rare d’en voir plusieurs ensemble, & former, tantôt une espèce de grappe, lorsqu’il y a plusieurs vaisseaux lymphatiques voisins qui sont affectés à-la-fois, & tantôt une espèce de chaîne, lorsqu’un même vaisseau lymphatique devient variqueux en plusieurs endroits de sa longueur.

Tout ce qui peut relâcher la peau, épaissir la lymphe & en ralentir le cours, peut contribuer à la formation de la loupe ; le défaut d’exercice, une vie molle & trop sédentaire, l’usage des alimens grossiers & de difficile digestion, l’abus des liqueurs spiritueuses, la suppression des évacuations habituelles, comme le flux hémorroïdal dans les hommes, & le flux menstruel dans les femmes ; la transpiration supprimée, la répercussion de quelqu’humeur dartreuse, des évacuations immodérées peuvent produire des loupes. Il est encore d’autres causes aussi efficaces que celles dont nous venons de faire mention, telles que les coups violents, les chutes, les contusions, les piqûres, les meurtrissures, une compression trop forte, faite & prolongée sur quelque partie du corps ; enfin la morsure de différens animaux. La loupe est une tumeur plus ou moins incommode, & le mal qu’elle peut causer est relatif à son volume & aux parties qu’elle occupe. Pour l’ordinaire elle n’a aucune mauvaise suite ; on en a vu cependant qui sont devenues cancéreuses, très-dangereuses & même mortelles.

Le pronostic des loupes doit dériver de leur volume, de leur nature, de leurs attaches à un certain nerf, à certains tendons & à certains vaisseaux, de leur profondeur & de l’épaisseur du kiste ou de la poche.

La loupe est un mal opiniâtre & difficile à guérir ; lorsqu’elle n’incommode point, le meilleur parti est de