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prement dit, appellé melon d’eau par les auteurs, rempli d’eau peu sucrée, sans parfum, même dans nos provinces du midi, où il est un peu plus passable que dans celles du nord. Il est inutile de répéter ici ce qui a déjà été dit à ce sujet.


Section II.

De la culture des Melons.


À Paris, on mange ce fruit beaucoup plutôt que dans les provinces du midi. Deux motifs y concourent ; l’art, & le choix des espèces hâtives : il y a donc deux cultures différentes, nécessitées par la différence des climats ; l’une, naturelle & c’est celle de l’intérieur du royaume & des provinces du midi l’autre, artificielle, & c’est celle des environs de Paris & des provinces du nord du royaume.


§. I. De la culture naturelle.


Dans les provinces, dans les cantons où la chaleur du climat est assez forte & assez soutenue, on donne peu de soins à cette culture. L’année de repos des champs à blé est destinée à l’établissement des melonnières. Après avoir donné aux époques ordinaires les labours, on ouvre, entre quinze à vingt pieds de distance de l’une à l’autre, de petites fosses d’un pied en quarré sur autant de profondeur, & la terre est rangée circulairement tout autour. La fosse est remplie avec de nouvelle terre franche, mêlée par moitié avec du terreau ou vieux fumier bien consommé. Pour l’ordinaire, cette terre est le résidu du balayage des cours, ou de la terre qui se trouve au fond des fosses à fumier, lorsqu’il a été enlevé. Dès qu’on ne craint plus les gelées tardives, on sème la graine dans les petites fosses, & dans chacune cinq ou six grains. Lorsqu’ils ont germé, qu’ils ont quatre feuilles, sans parler des cotyledons ou feuilles séminales, (Voyez ce mot) on en détruit deux ou trois, afin que les autres aient plus de force. La graine est enterrée environ à un pouce de profondeur. S’il ne tombe pas de pluie de longtemps, on arrose chaque fosse ; mais, comme souvent l’eau n’est pas à la portée du champ, le cultivateur recouvre, avec la baie du blé, de l’orge, de l’avoine, ou avec de la paille coupée menue, ou enfin avec des herbes, la superficie de la fosse, à l’exception de la place où sont les semences. Par ces petits soins, il conserve la fraîcheur de la terre, & empêche l’évaporation. La terre première, tirée de la fosse, abrite les jeunes pieds contre les vents.

Avant de confier à la terre la graine de melons, on la jette dans un vase plein d’eau. La mauvaise surnage, la médiocre descend lentement ; mais la bonne se précipite tout d’un coup, & c’est la seule qu’on sème. Ainsi on n’attend pas que la médiocre ait gagné le fond, pour vider l’eau du vase ; & en s’écoulant, elle entraîne la médiocre & la mauvaise graine. Le cultivateur sait encore qu’au besoin il peut semer la graine cueillie & conservée avec soin depuis trois ans, mais il préfère celle de la dernière récolte, parce qu’elle germe plus vite. S’il a plusieurs beaux fruits dans sa melonnière, il les respecte, ne les vend point, & les laisse pourrir sur pied, patce qu’il est bien convaincu que la chair du fruit est destinée à perfectionner la graine, &