Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1785, tome 6.djvu/546

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

exigez qu’ils soient fidèles. S’ils s’habituent une fois au gaspillage, vous ne parviendrez plus à le détruire, même en congédiant les plus vicieux ; il faut alors faire ce qu’on appelle maison neuve. Ce n’est pas tout, tâchez d’éloigner, de dépayser, autant que vous le pourrez, ces anciens serviteurs ; s’ils communiquent avec les nouveaux, ils chercheront à justifier leur conduite par celle de leurs prédécesseurs, dont les conseils auront bientôt corrompus les nouveaux venus.

Le propriétaire, par la position de sa maison, voit d’un seul coup d’œil tout ce qui se passe dans sa cour & dans ses jardins, & le voit à toutes les heures du jour. La grille, n° 3, une fois fermée, tout est sous sa main, & en sûreté : son ombre seule suffit pour contenir tout son monde dans le devoir, parce qu’il n’y a ni coin, ni recoin, ni cachettes capables de dérober à sa vue le paresseux, ou l’homme à mauvaise volonté. Le. propriétaire doit sans cesse avoir présent à l’esprit cet adage de l’inimitable Lafontaine : il n’est pour voir, que l’œil du maître.

L’homme singe des grands seigneurs, dira : quoi ! dans cette cour, je verrai passer le bétail qui va ou qui revient des champs ; j’aurai l’ennui d’entendre le bêlement des troupeaux, d’y voir des poules, des dindes, &c. Il vaut beaucoup mieux élever des murs qui masquent tout ce fatras de ménagerie. Je lui dirai à mon tour : restez à la ville, vous n’êtes pas digne de vivre à la campagne, & de sentir le prix des plaisirs innocens qu’on y goûte. Vous ne faites donc pas attention que ce petit fracas est bien éloigné du tumulte bruyans des villes ; que les mêmes objets changent la scène d’un moment à l’autre ; que ces diverses sortes d’animaux l’animent & donnent la vie au paysage, &c… Pour vous faire plaisir, je conviens que j’ai le goût campagnard, & que je fuis toutes les occasions de m’ennuyer avec dignité. La campagne & ses accessoires sont froids à vos yeux, parce qu’accoutumé aux plaisirs factices, vous savez peu apprécier ceux qui sont attachés la simplicité de la nature. Ils sont doux, tranquilles & sans remords. Eh ! croyez-moi, ils en valent bien d’autres ! Cependant, je ne veux point disputer sur les goûts, chacun a sa manière de voir ; ainsi, je n’offre ce plan que pour ce qu’il vaut, & sans prétention.

Je n’entre dans aucun détail sur le prix du toisé de maçonnerie, des ferrures, des bois, & autres objets nécessaires à la construction. & à ses aisances. Le prix de chaque objet varie d’une province, & même d’un canton à l’autre ; ainsi, un tableau de dépense dans un village des environs de Paris ne sauroit servir dans les provinces où l’on ne connoît pas le plâtre, & ainsi du reste. Sur ces objets, on doit, consulter les gens de l’art du lieu ; & observer que si l’on donne à prix fait, on sera mal servi ; que tout s’exécute à la journée, & en fournissant les matériaux, le travail sera bon, mais plus coûteux, & qu’il faut compter qu’il en coûtera un tiers de plus que la masse totale portée dans le devis estimatif. Je ne spécifierai également pas le nombre de valets & de bestiaux nécessaires à l’exploitation d’une métairie quelconque. Il dépend de la qualité des terres & des genres de produit. Par exemple, une métairie de qui dépendent beau-