Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/320

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orangers font ordinairement éclore trois ou quatre bourgeons ensemble : c’est le plus droit, le mieux nourri, le mieux placé qu’il faut conserver. On les visitera une fois le mois, & vers le solstice d’été tous les quinze jours. Depuis la fin d’août jusqu’au temps où l’on les serre, l’ébourgeonnement n’a plus lieu. Quantité de jardiniers, & la Quintinie entr’autres, s’accordent à laisser croître la tête de leurs arbres de six pouces au pourtour pour chaque bourgeon de l’année, ce qui fait un pied de diamètre. Il s’en faut bien que cette règle soit suivie ; si elle l’étoit, on ne les verroit pas presque toujours les mêmes. De plus, si un oranger augmentoit chaque année dans cette proportion, sa tête, au bout de six ans, auroit une toise de plus dans son diamètre, ce qui en feroit trois de tour. Les orangers de Versailles, âgés de plus de cent ans, n’ont pas cent pieds de diamètre qui en feroient trois cens de tour. La cause de leurs progrès peu sensibles, doit être attribuée ou au défaut de conduite, ou aux événemens fâcheux, tels que les vents, la gelée & la grêle qui obligent de les rapprocher de temps à autre. Dailleurs, si tous les ans ils croissoient d’un pied de diamètre, quelle caisse les contiendroit, & quelle serre pourroit les recevoir ? »

» Nous avons parlé dans le paragraphe précédent de certains bourgeons qui se rabattent sur leurs inférieurs : voici comment on les ébourgeonne. Ou ils sont nécessaires dans la place qu’ils occupent, ou ils ne le sont point ; dans le premier cas on les conserve, mais on les empêche de se renverser en attachant en travers ou perpendiculairement une petite baguette aux branches voisines, qui leur sert de tuteur jusqu’à ce qu’ayant été aoûtés, ils aient pris leur pli. Dans le second cas on les supprime entièrement. Il peut arriver qu’il n’y ait qu’une partie de ces bourgeons d’utile pour la forme de l’arbre, ou pour remplacer quelque petite pousse voisine : on les raccourcit alors à trois ou quatre yeux en les faisant monter droit, & ces yeux font éclore de bons bourgeons dont par la suite on fait choix pour garnir l’arbre.

» Dans le fort de la pousse des orangers, au commencement de juillet, sur-tout lorsque les années sont humides, il paroît une multitude de petits faux bourgeons maigres, tendres & d’un vert pâle naissant. Ces branches folles qui poussent fréquemment des aisselles, des gourmands, peuvent se couper dès leur naissance avec l’ongle du pouce. Ce qui embarrasse le plus dans nos orangers, comme dans nos autres arbres fruitiers, ce sont les gourmands & les demi-gourmands. Il est des moyens sûrs d’en tirer de grands avantages & d’éviter les maux qu’ils peuvent occasionner. Ils deviennent très-précieux toutes les fois qu’ils sont placés avantageusement, c’est-à-dire qu’ils n’ont autour d’eux que du bois mesquin & des pousses chétives, ce qui les met en état de renouveler cette partie de l’arbre où ils ont pris naissance. Il y a pour lors deux moyens d’en faire usage ; le premier est de ne point trop laisser grandir ces gourmands, mais de les arrêter de bonne heure pour leur faire pousser des drageons capables de garnir la place. On les coupe à cet effet à moitié au-dessus d’un œil,