Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/34

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mieux la receper près de terre ; cette opération fortifie, augmente le nombre & la force des racines, & il est rare qu’à la seconde année on n’ait pas une tige d’une superbe venue. Le morceau de la tige coupée est planté près du pied, & avertit le travailleur de prendre garde à ne pas l’endommager avec le pied : ce retranchement de tige doit avoir lieu en février ou en mars au plus tard, lorsqu’il ne gèle plus ; & avant que la sève soit en mouvement, on fera très-bien de recouvrir la coupure avec l’onguent de saint Fiacre.

Il sort souvent du tronc coupé plusieurs bourgeons qui formeroient autant de tiges. On les laisse végéter pendant quelques jours ; ensuite on les supprime les uns après les autres, & l’on conserve celui qui paroît le meilleur. Cette suppression doit être successive, il faut mettre quelques jours d’intervalle entre la destruction de chacun de ces bourgeons naissans, dans la crainte de fatiguer la plante trop à la fois. Si, l’année suivante, la tige est encore trop fluette, & s’il faut revenir à receper de nouveau, il vaut mieux arracher l’arbre, ou si on le conserve, ce sera pour les taillis, &c. Après deux ans de pépinière, un arbre qui n’a pas fait sa tige capable d’être greffée, ne prospérera jamais bien. Dans les pays très-froids où l’on ne peut espérer une belle végétation, on doit renoncer aux pépinières, & se contenter de faire venir les pieds d’un pays où le climat plus tempéré permet aux arbres de prendre des tiges d’une belle venue : cette assertion demande cependant quelque modification. Si, en sortant de la pépinière, l’arbre doit être planté sans avoir été greffé, alors on pourra l’y laisser jusqu’à que sa tige devienne forte, & on le greffera ensuite en place, ainsi qu’il sera dit ci-après.

Il est rare que dans la pépinière les tiges se recourbent, sur-tout si on a laissé la distance de trois pieds entre chaque plant. Le cas est plus commun lorsque l’on a planté plus serré ; alors on donne un tuteur à l’arbre pour le resserrer & le soutenir, & s’il pousse des branches latérales, on les laisse subsister afin de forcer la tige à prendre plus de grosseur.

CHAPITRE V.

De la greffe de l’arbre en pépinière, & de l’arbre planté à demeure.

Le mûrier est susceptible de toutes les espèces de greffe. (Voyez ce mot) La greffe à écusson est aujourd’hui la seule employée dans les pépinières. On greffe ainsi au bas de la tige de l’année, à six pouces au-dessus du sol. Si, dans cette partie, la tige n’a pas au moins six lignes de diamètre, c’est-à-dire dix-huit lignes de circonférence, elle est trop foible pour recevoir l’écusson. Quelques particuliers laissent un pied de tige au-dessus de l’écusson, afin que la sève étant partagée, ne se porte pas avec trop de force sur la greffe, & ne la noie pas. Ils laissent sur cette partie excédente épanouir quelques boutons ; ils les retranchent peu à peu à mesure que le jet de la greffe se fortifie, & cette partie excédente de la tige sert de tuteur au jet tendre de la greffe. Par cette petite précaution, on redresse le jet en assujettissant doucement & mollement contre le tuteur ; & lors-