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ARTICLE PREMIER.

Analyse de la farine.


Pendant long-temps les cultivateurs & même les écrivains n’ont distingué dans un grain de blé que l’écorce qui lui sert d’enveloppe, le germe destiné à sa reproduction, & enfin la matière farineuse dans laquelle réside la vertu alimentaire ; mais aujourd’hui que l’étude des objets d’utilité première fixe l’attention des savans, lrurs recherches ont appris que cette matière farineuse est elle-même composée de plusieurs substances dont la nature & les proportions varient à raison du sol, du climat & de la culture : ces substances sont l’amidon, la substance glutineuse, la matière muqueuse, le sucre. La connaissance de ces différentes parties constituantes, ne doit pas être indifférente, puisque l’art de conserver la farine, de l’assortir avantageusement, & de la convertir en pain de bonne qualité, dépend en partie de cette connaissance.

Des soins préalables à la mouture.

En supposant que toutes les conditions nécessaires pour obtenir des blés nets aient été parfaitement remplies par le laboureur ou par le commerçant, on pourroit les envoyer au moulin sans aucune opération préalable, la poussière qu’ils retiendroient encore, seroit facilement séparée, au moyen d’un crible placé au dessus de la trémie.

Mais une précaution essentielle qu’exige le blé le plus parfait, c’est que quand les eaux sont basses, ou que le temps est calme, il faut éviter d’envoyer moudre une plus grande quantité que le local du meûnier ne le permet, car souvent c’est là que le grain négligé, abandonné, perd de ses bonnes qualités. Il est donc prudent, quand on entreprend la mouture d’une provision de blé considérable, de ne le faire transporter au moulin qu’à mesure que l’on moud, parce que ne pouvant jouir seul du moulin, il est nécessaire, comme dit le proverbe : Que chacun engraine à son tour.

Est-on forcé de se servir de blés nouveaux, avant qu’ils aient ressué au grenier ? il faut toujours faire ensorte de les mêler avec des blés vieux ; la mouture s’en fait plus aisément, & ceux-ci rendent une farine qui donne au pain le goût de fruit.

Cependant, pour bien moudre le blé, il faut qu’il conserve une portion d’humidité, sans laquelle la totalité du grain se divise au même degré ; le son également pulvérisé passe à travers les bluteaux les plus serrés, se mêle à la farine, & il ne résulte qu’une farine terne & piquée, ce qui lui enlève de sa valeur dans le commerce : les blés des provinces méridionales sont principalement dans ce cas, il est constamment utile de leur restituer l’eau que le même grain à quelquefois par surabondance ; il faut le mouiller, & ce mouillage doit précéder la mouture de deux fois vingt-quatre heures.

S’il est avantageux de mêler, avant d’engrainer, les blés secs avec les blés humides, les blés gris & durs avec les blés jaunes & tendres, les blés vieux avec les blés nouveaux,