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branches à son sommet, & on le conduit ensuite comme le peuplier blanc ; mais si on le destine particulièrement à fournir des échalas aux vignes, on lui coupe la tête à une certaine hauteur, afin qu’il pousse à la manière des saules. J’aime mieux le planter suivant la première méthode, &, à la seconde année, après qu’il a bien repris, & que sa végétation est complette, abattre sa tête, lui laisser un plus grand nombre de ses rameaux du haut, & abattre les inférieurs. Si on lui conserve la tête, on doit la conduire comme celle du peuplier blanc, lorsqu’on le destine à faire des taillis ou des fourrées aux bords des rivières, afin de s’opposer aux ravages causés par les débordemens. On le plante, dans le premier cas, à cinq pieds de distance, & on choisit, pour enfoncer en terre, les bourgeons de l’année que l’on ravale à quelques pouces de terre ; après la première année, on les recèpe de nouveau & on regarnit les places vides. Dans le second cas on les plante près les uns des autres & on les coupe à fleur de terre, & les pousses sont recépées l’année suivante.

À moins que le climat ne soit très-rigoureux, & c’est encore une expérience à faire, on met en terre les plançons & les boutures aussitôt après la chute des feuilles. La terre a le temps de se serrer pendant l’hiver, & la reprise est plus assurée que lorsque l’on plante à la fin de l’hiver.

Ce peuplier demande à être taillé tous les trois ou quatre ans, & le bois des échalas de quatre ans est beaucoup meilleur que celui de la troisième année. Si après avoir converti les branches en échalas, on leur enlève leur écorce, ils durent beaucoup plus long-temps. Le tronc sert à faire des poutres, des solives, des chevrons, des planches, &c. il faut bien les employer quand on n’a ni sapin, ni chêne, & pourvu qu’on le garantisse de l’humidité & de la pluie, il subsiste très-long-temps.

Le peuplier d’Italie. Il a été un temps en France où l’on ne voyoit, ne parloit, & où on ne plantoit plus que des peupliers d’Italie. C’étoit une manie, une fureur qui fit établir des pépinières dans presque toutes les provinces ; on se porta même jusqu’à écrire que cet arbre pourroit servir à faire des mats de vaisseaux. Qu’a produit cet enthousiasme ? Rien, ou presque rien, si on en juge par ce qui existe aujourd’hui. Les utiles peupliers du pays furent supprimés, & on en ressent encore de leur perte. La peuplomanie fit déraciner les avenues plantées en ormeaux, en tilleuls, dans lesquelles on bravoit les ardeurs du soleil, & on eut à leur place de beaux arbres qui s’élevoient agréablement en pyramides ; mais bientôt leur base s’élargit, les tiges s’élevèrent, & l’on eut tous le contraire de ce que l’on désiroit ; l’avenue parut très-étroite vers le bas de l’arbre, très-large à son sommet, & le voyageur resta exposé à toute l’activité du soleil. Quelques particuliers, croyant remédier à ce défaut essentiel, firent tailler ces arbres en éventail, & le fatal ciseau leur fit perdre en un instant leur seul mérite, celui de bien pyramider. Un second défaut de ces avenues consiste dans leur monotonie qui assomme. Il faut cependant conve-