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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1786, tome 7.djvu/70

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cognoîtrez la matière estre suffisamment rouie, par l’espreuve qu’en ferés, desséchant & battant une poignée de chacune de ces trois sortes d’écorces, remettant au serein celles qui ne seront pas assés appareillées, & en retirant, les autres comme le recognoitrés à l’œil. »

Voilà donc cette opération si prônée de nos jours, comme une précieuse découverte, suivie, il y a long-temps dans toute son étendue. L’auteur ne propose pas d’établir des pépinières dans la vue de retirer la soie des jeunes branches de la pourrette, ni même de leurs tiges ; on le pourroit cependant, si on attendoit l’époque de la seconde séve, car pendant la première, de pareilles coupes répétées chaque année, auroient bientôt épuisé la pourrette : d’ailleurs, les pousses après la seconde séve, seront peu considérables, & resteront herbacées en très-grande partie, si le climat est sujet à des gelées précoces, ou n’est pas naturellement chaud. Je conviens que retirer de la soie des écorces, seroit une économie ; malgré cela, les loix physiques de la végétation s’opposent à la taille des arbres pendant l’été ; c’est bien assez de les priver de leurs feuilles. Ne seroit-il pas possible, en taillant aussitôt après la chute naturelle des feuilles, époque à laquelle il reste encore un peu de séve dans les branches, de les plonger alors dans l’eau, de les y laisser pendant quelques jours, & examiner ensuite si on pourroit les écorcer. La séparation de l’écorce sera plus difficile que pendant la séve, mais je ne la regarde pas comme impossible. La saison actuelle ne me permet pas de faire cette expérience, & chacun peut la tenter ; il en résulteroit que l’on auroit le bénéfice de l’écorce, & que l’arbre seroit ménagé.

Le fruit du mûrier engraisse très-promptement la volaille, les cochons, & les feuilles rassemblées après leur chute & mises à sécher, sont dévorées par les troupeaux : c’est pour eux une excellente nourriture d’hiver.

Le bois des taillis est employé utilement, comme perches à soutenir des treillages, comme tuteurs pour les arbres ; celui du tronc & des grosses branches fendu & scié en planches d’un à deux pouces d’épaisseur, sert à la fabrication des vaisseaux vinaires, qui contiennent depuis 1100 jusqu’à 3000 bouteilles & plus. Ce bois est encore avantageux pour les vins blancs, il leur communique un petit goût agréable & approchant de celui que l’on appelle violette. Dans les pays de vignobles à échalas (voyez ce mot), longs ou courts, on apprécie le bois du mûrier. Il dure infiniment plus que tous les bois blancs, moins que le chêne, à la vérité, mais autant que celui des taillis de châtaignier, sur-tout si on a la précaution de l’écorcer.

On a dit que les couchettes faites de bois de mûrier, ne sont pas sujettes aux punaises, ni à la vermine : le fait est faux ; la propreté seule écarte ces insectes.

§. III. Propriétés d’agrément. Le mûrier devient un arbre très-précieux, dans les provinces méridionales, pour les décorations des jardins, puisque la charmille, le hêtre ne sauroient y croître, sans être largement arrosés, & l’eau y est trop rare pour être consommée en objets de pur agrément. Le mûrier craint peu la sécheresse, ses branches se prêtent volontiers à la forme qu’on veut leur