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CHAPITRE II.

la conduite des pigeons.

Section première.

Des pigeons bisets ou fuyards.

1°. De la manière de peupler un colombier. Il en existe plusieurs ; toutes ne sont pas également avantageuses. La meilleure, sans contredit, consiste, après que le colombier a été mis en état (consultez ce mot) à choisir vers la fin de l’hiver, une quantité proportionnée de pigeons de l’année précédente & des premières couvées, s’il est possible ; de les jeter dans le colombier dont on aura avec soin fermé la trappe de fil de fer qui interdit aux pigeons la sortie du colombier par les ouvertures ménagées à cet effet. On leur donnera chaque jour de l’eau nouvelle & du grain en quantité suffisante ; la même personne sera toujours chargée de ce foin & elle ira leur donner à manger à la même heure ; au bout de deux ou trois jours, les pigeons seront accoutumés à la voir, ils attendront cette heure avec impatience, ils ne seront plus effarouchés, & l’habitude qu’ils auront contractée, se perpétuera de race en race. Les animaux ne sont qu’habitude ; combien d’hommes leur ressemblent ? Ces oiseaux bien nourris, bien abreuvés & ne s’épuisant pas à courir les champs, ne tarderont pas à entrer en amour. Si on veut accélérer leur ponte, on leur donnera de l’avoine & sur tout de la graine de chenevi, mêlée, si l’on veut, avec un peu de graine de cumin, ou d’anis, ou de telle autre graine de plante ombellifère qui végète naturellement dans les terrains secs… Dès que l’on s’aperçoit que les pontes sont faite, qu’il commence à y avoir des œufs éclos, on ouvre alors la trappe & le mâle ou la femelle, entraînés par leur première éducation, vont dans les champs chercher la nourriture pour leurs petits. On continuera encore pendant quelque temps à leur donner du grain, mais peu à peu on en diminuera la quantité, & après l’incubation de la seconde ponte, on n’en donnera plus. On est assuré par là, de fixer pour toujours dans le colombier les pères, les mères, & leur progéniture, & que les nouveaux nés ne quitteront plus le colombier, s’ils y sont tenus proprement, & qu’ils n’y soient pas inquiétés par les rats, les fouines, ou par les chouettes ; &c. les pères occupés de la seconde ponte, ne songeront pas à fuir, & après qu’elle fera finie, ils seront accoutumés à leur nouveau domicile.

Il convient de choisir au moins à une ou deux, & même à trois lieues de l’endroit, les premières paires de pigeons dont on veut peupler son colombier, dans la crainte que la proximité & la vue de l’endroit où, ils sont nés ne les y rappellent, quoiqu’ils en ayent été séparés depuis plusieurs mois. L’effet des premières impressions est bien difficile à détruire.

Le nombre des premières paires de pigeons à jeter dans un colombier, doit être proportionné à son étendue. Cet oiseau, accoutumé à vivre en société, languit & se déplaît quand il est, pour ainsi dire, dans la solitude ; c’est donc une première dépense à faire, & tout à la fois, afin de hâter