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faire du goudron, & la plaie se trouve rafraîchie par ce procédé.

Les souches de pins que l’on abat, ne repoussent point ; on les arrache de terre, & on en retire les racines pour en faire du goudron ; enfin, toutes les parties de l’arbre, même les branches, sont propres à cet usage, pourvu que les bois en soient gras & fort résineux.

En faisant le goudron, on peut se proposer deux objets ; l’un est de retirer la substance résineuse, & l’autre, de faire du charbon.

Si l’objet principal est d’avoir du charbon, on met dans le fourneau toutes les parties du tronc & des branches ; mais si le principal objet est d’en extraire le goudron, on choisit le cœur de l’arbre qui est rouge, les nœuds & toutes les veines résineuses ; le goudron qu’on en fait est alors beaucoup plus gras.

Comme il faut que le bois soit à moitié sec pour en extraire le goudron, on a coutume, en Provence, d’abattre les pins rouges dans le mois, de mars ; mais dans les pays où l’on fait beaucoup de goudron, on abat les arbres dans le cours de l’année, & on les porte au fourneau quand ils sont parvenus au degré de siccité convenable.

Lorsque l’on charge les fourneaux avec du bois bien rouge & bien résineux, on en retire à peu près le quart de son poids de bon goudron, c’est-à-dire, vingt-cinq pour cent ; mais le plus ordinairement on n’en retire que dix à douze pour cent.

En Provence, quand le bois est au degré de siccité convenable, on le coupe en petites pièces d’environ dix-huit pouces de longueur, sur un pouce ou un pouce & demi de grosseur. On les arrange dans le fourneau pour la plus grande partie, par lits qui se croisent en formant des grilles, & on fourre verticalement les morceaux de bois pour remplir les vides.

Les fourneaux de Provence ont la forme de grandes cruches, & ils ressemblent beaucoup à ceux qu’on fait dans le Valais, si ce n’est qu’une partie du fourneau est enfoncée en terre : ces fourneaux ont au fond dix-huit pouces en-dedans, à la partie la plus large, cinq pieds, qu’on réduit à deux vers la bouche. Cette largeur est nécessaire, afin qu’un homme puisse entrer dans le fourneau avec un panier rempli de bois. Cette partie du fourneau est fortifiée par des frettes de fer.

L’intérieur du fourneau a environ cinq pieds de hauteur… ; pendant que le charbon se forme comme on le dira ci-après, le goudron coule dans un réservoir qu’on a soin de tenir à couvert de la pluie.

Les fours des environs de Bordeaux, sont d’une forme différente ; ils ont la figure d’un cône tronqué, dont la base est de quatre toises de diamètre, & la hauteur, d’une toise & demie. Le fond est exactement pavé de briques, il est traversé par une rigole faite d’un jeune pin équarri & auquel on a fait des coches aux angles. Le fond de cette rigole doit être de la hauteur d’un tuyau d’environ un pouce & demi de diamètre ; c’est par là que le goudron sort pour se rendre dans un baquet.

On emporte tout l’aubier des pins, puis on fend le cœur en barreaux d’un pouce en quarré sur trois pieds de longueur. On remplit l’intérieur du