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chissante, dessiccative, vulnéraire, balsamique, anodine.

Usages. Les fruits sous forme de cataplasme, calment la douleur & la chaleur des brûlures récentes & des hémorroïdes externes. L’huile par infusion des fruits, au lieu de diminuer ces espèces de maladies, ne fait que les accroître, ainsi que les gerçures du sein, les plaies des tendons & celle des nerfs. La faculté qu’on attribue aux feuilles de consolider les plaies récentes, est très-douteuse. Cependant plusieurs médecins recommandent avec emphase cette infusion comme un baume incomparable. Il seroit temps, je l’ai déjà dit, que la société royale de médecine entreprît un travail pratique & suivi, afin de constater les propriétés des plantes & de déterminer une fois pour toutes jusqu’à quel point elles sont utiles ou nuisibles ; ce seroit le plus grand des services qu’elle pourroit rendre à l’humanité : il n’y a qu’un corps aussi éclairé que celui-là, & dont tous les efforts sont réunis, de qui on doive attendre ce bienfait. Elle rempliroit alors le but de son institution.


POMME DE TERRE.[1] Cette plante est le plus utile présent que le Nouveau Monde ait fait à l’ancien. On l’a confondue, & on la confond encore tous les jours avec la patate & le topinambours ; ces trois végétaux, il est vrai, sont originaires de l’Amérique ; leur utilité alimentaire, la facilité de leur propagation, & leur étonnante fécondité, sont également incontestables, mais ils appartiennent à des familles très-distinctes, n’ayant entre eux aucune ressemblance dans les parties de leur fructification. La pomme de terre est un solanum ; la patate un convolvulus, ou liseron, & le topinambours, ou poire de terre, un corona solis, ou tournesol.

C’est encore avec aussi peu de fondement qu’on désigne, dans beaucoup de cantons, la pomme de terre sous le nom de truffe blanche & de truffe rouge, mais il est pareillement très-aisé de distinguer les caractères qui établissent sa différence respective avec la substance fongueuse informe, que les botanistes ont placés dans la cryptogamie. Quels que soient donc la figure, le volume, la couleur, & la production de la pomme de terre, elle n’est ni la patate, ni le topinambours, ni la truffe, & peut être, pour éviter toute méprise, seroit-il utile de lui trouver une autre dénomination, car la pomme de terre n’est pas plus une pomme, que le topinambours n’est une poire.

Dans la multitude innombrable des plantes qui couvrent la surface sèche & la surface humide du globe, il n’en est point en effet, après le froment, le seigle, l’orge & le riz, de plus digne de nos soins & de nos hommages que celle qui fait l’objet de cet article, sous quelque point de vue qu’on l’envisage. Elle prospère dans les deux continens ; la récolte ne manque presque jamais, elle ne craint ni la grêle, ni la coulure, ni les autres accidens qui anéantissent en un clin d’œil le

  1. Cet article nous a été fourni par M. Parmentier, il suffit d’en nommer l’Auteur.