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elle ne donne plus que des racines chevelues & fibreuses.

On remédie à ces différentes espèces de dégénération alarmante pour les cantons qui les éprouvent, en imitant ce qui se pratique à l’égard des grains, c’est-à-dire, en changeant de semence ; mais le moyen le plus efficace d’arrêter le mal à sa source, c’est de renouveler par l’emploi des semis les espèces fatiguées ou abâtardies.

Mais une maladie qui paroît affecter plus particulièrement la pomme de terre, connue dans le Lyonnois sous le nom de frisolé, & en Flandre, sous celui de pivre, a pour caractère d’avoir la tige d’un vert brunâtre, comme bigarrée, les feuilles plissées, maigres, frisées, & près de la tige, marquées de points jaunâtres, & d’une texture fort irrégulière. Quelques auteurs allemands ont décrit cette maladie, qu’ils attribuent à la semence plutôt qu’au terrain ou à la saison.

Le» expériences suivies qu’à faites M. de Chancey, prouvent qu’il y a des variétés plus exposées à cette maladie ; que celles qui proviennent des montagnes en sont moins susceptibles que celles des plaines ; que les rouges longues & rondes y sont plus sujettes que les blanches, & que, comme le tubercule qui a donné une plante frisée en produit de même l’année suivante, il est essentiel, après que les plantes sont levées, de les visiter soigneusement, afin d’arracher tous les pieds malades, & de les remplacer aussitôt ; car on ne sauroit trop prendre de précautions pour éviter une maladie capable de diminuer quelquefois la récolte d’un dixième ; mais une observation à faire, c’est que les semis, sont insuffisans pour la prévenir ; puisque des pommes de terre venues par cette voie ont présenté quelques pieds également frisés.

Les pommes de terre sont encore sujettes à la rouille comme les blés. Il se trouve quelquefois à la surface des feuilles des gouttes d’eau. Les rayons trop ardens du soleil en forment bientôt des taches qui font languir la plante. Les racines ont quelquefois dans leur intérieur des nodosités noires, semblables à des squirres, & sont plus dures, plus filamenteuses qu’à l’ordinaire. Pour juger si ces défauts se conservoient d’âge en âge, se communiquoient, & si on pouvoit les saisir dans les développemens de la fructification du végétal d’après quelques caractères particuliers, j’ai planté des pommes de terre squirreuses seules, & ensuite réunies à d’autres saines ; j’ai remarqué qu’elles végétoient plus lentement, & que si les tubercules étoient sans ces défauts, leur petit nombre devoit les faire rejeter pour la plantation ; enfin, que quand ils avoient ce défaut, il valoit mieux les donner aux bestiaux sans craindre que leur usage pût être suivi d’aucun inconvénient.

La pratique sage des bons cultivateurs qui ont grand soin de changer chaque année de semence, de se servir toujours de celle moissonnée dans des terrains, & à des aspects opposés, doit être rappelée ici pour la plantation des pommes de terre, si on veut éloigner sa dégénération. Il faut donc préférer celles venues à quelque distance du lieu où on veut les mettre, & ne planter sur les terres fortes & élevées que