Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/248

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


SECTION XI.

Des différents méthodes de cultiver les Pommes de terre.

Il existe plusieurs méthodes de cultiver les pommes de terre, dont l’efficacité a été constatée par les expériences des savans qui les ont décrites, mais ces méthodes varient entr’elles selon la nature du sol & l’étendue de terrain qu’on veut en couvrir ; il convient de les indiquer toutes, le laboureur choisira à son gré celle qui lui paroîtra la plus avantageuse pour son terrain & pour l’emploi qu’il se propose de faire de ces racines. Nous observerons seulement que cette culture ne deviendra réellement utile à la plûpart de nos provinces, qu’autant qu’elle sera exécutée en grand & avec des animaux, comme on cultive les vignes en Gascogne.

Première méthode. Le terrain étant hersé & uni a l’instant de la plantation, le laboureur commence à ouvrir une raie la plus droite possible avec la charrue, deux personnes la suivent, l’une pour jeter une poignée de fumier, & l’autre la pomme de terre du côté où marche la charrue, c’est-à-dire, proche la raie qu’elle vient de faire, afin de ne pas déranger le fruit ; & l’oreille qui pousse la terre sur la raie voisine, pousse en même-temps le fumier qui enveloppe par ce moyen la pomme de terre ; l’on fait ensuite deux autres raies dans lesquelles on ne met rien, ce n’est qu’à la troisième qu’on recommence à fumer & à semer, & ainsi de suite jusques à la fin, en sorte qu’il y ait toujours deux raies vides, & que les plantes n’étant pas vis-à-vis les unes des autres soient espacées d’un pied & demi, puissent s’étendre, être cultivées & récoltées à la charrue.

Lorsque le champ est ainsi couvert, on le laisse en cet état jusqu’à ce que la plante ait acquis trois pouces environ de hauteur.

Seconde Méthode. Si au lieu d’ajouter le fumier aussitôt que l’on plante, on le répand uniformément dans la pièce quelque temps auparavant, comme pour y faire venir du froment, on peut récolter d’assez bonne heure pour faire succéder aux pommes de terre les semailles d’hiver, ce qui remplace par un grand profit la perte de l’année de jachère : cette méthode pratiquée par M. Vanberchen, père, se trouve insérée dans le tome premier des Mémoires de la Société Physique des Sciences de Lausane.

Troisième Méthode. Après avoir labouré le terrain destiné aux pommes de terre, on le herse afin de l’ameublir, ensuite on fait plusieurs rangs de trous d’un pied de profondeur sur deux de largeur, éloignés les uns des autres de trois pieds environ, on remplit ce trou de fumier qu’on foule exactement, & sur lequel on place une pomme de terre ou un quartier, qu’on recouvre ensuite avec une partie de la terre qu’on en a retirée ; mais cette méthode adoptée par les irlandois, consommant beaucoup d’engrais, ne sauroit être bien avantageuse qu’aux environs des grandes villes, où ils sont ordinairement plus communs.

Quatrième Méthode. Le champ qui doit servir à la plantation des pommes de terre, ayant été suffisamment préparé, on pratique avec la bêche des rigoles de cinq à six pouces de