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largeur & de profondeur. On met dans ces rigoles les pommes de terre de semence à la distance d’un pied & demi les unes des autres, & une jointée de fumier par dessus ; on recouvre le tout avec la terre qui provient de l’autre rigole ou tranchée, & ainsi successivement.

Cinquième Méthode. Elle est pratiquée depuis quelques années avec le plus grand succès, par M. Cretté de Palluel, l’un des cultivateurs les plus distingués. Cette méthode consiste à renverser, à l’aide de la charrue, trois raies l’une sur l’autre en forme de sillon ; ce qui élève le terrain & fait des ados d’environ trois pieds de large : le fond de chaque sillon est fumé & ensuite labouré à la bêche : c’est dans ce fond & sur ce labour qu’il met la pomme de terre avec la houe à un pied de distance ; de cette manière chaque rang est espacé à trois pieds, & chaque plante à un pied, ce qui, en poussant, forme des rangées, & non des touffes isolées.


Section XII.

Des différentes façons de culture.

Quelle que soit l’espèce de pomme de terre & la méthode de culture adoptée, on ne sauroit trop insister sur la nécessité de bien observer entre chaque pied une distance suffisante ; de placer toujours la semence à cinq à six pouces de profondeur, afin qu’elle soit garantie des impressions du froid ou de la chaleur, & de lui donner deux façons de culture : la terre étant plus travaillée, les plantations qui succèdent réussissent mieux. La plupart des cultivateurs, il est vrai, n’ont ni le temps ni les moyens de sarcler & de butter à la main une grande plantation ; mais ces deux opérations très-essentielles pourront toujours être exécutées à la charrue, lorsqu’on aura observé des rangées droites & une distance suffisante entr’elles. L’épargne du temps & de la main d’œuvre compensera alors beaucoup au-delà le produit moindre qu’on obtiendra par ce moyen. Il est vrai qu’il ne faut pas se presser de donner des façons, sur-tout si le terrain n’a pas été défoncé.

Première façon. Dès que la pomme de terre est assez haute pour pouvoir être distinguée de la foule des herbes qui croissent en même temps, il faut nettoyer le champ, en labourant les intervalles avec la houe ou la petite charrue, afin de bien ameublir la terre ; on ne doit pas même craindre d’en couvrir un peu la plante, ni de la coucher, car l’expérience a prouvé qu’elle se relève bientôt & pousse ses feuilles avec plus de vigueur : quelquefois le sol & la saison sont si favorables à la végétation des plantes parasites, qu’il est nécessaire de répéter ce sarclage : on n’y manque guères dans les potagers, mais en plein champ on y regarde à deux fois ; cependant elles nuisent infiniment à l’accroissement des racines.

Deuxième façon. Elle consiste à relever tout autour de la tige une suffisante quantité de terre pour en former une motte. Cette opération qu’on nomme butter, ne doit avoir lieu qu’au moment de la floraison, & il faut bien prendre garde de ne pas trop ébranler la plante ; elle aide la tige à se soutenir, favorise la multiplication des racines & détruit les mauvaises herbes qui ont poussés