Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/335

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qu’avec beaucoup d’épargne, elle aide à entretenir grande abondance de volaille, dont elle est grassement nourrie avec un peu de grain qu’on lui donne d’ordinaire ; ainsi procède-t-on à cet artifice. Une fosse est faite de la figure & de la grandeur qu’on veut, non toutefois moindre en chacune face, étant quarrée de 10 à 12 pieds, & à l’équipolent d’autre figure, profonde de trois à quatre, en lieu un peu pendant pour en faire vider l’eau du fond, de peur d’y croupir ; au défaut duquel lieu, par estre l’endroit en parfaite planure, sans s’arrêter à le creuser, on en élèvera le bas avec de la terre pour la faire vider, & l’enclora-t-on de murailles bien maçonnées de la hauteur de trois à quatre pieds, comme si c’étoit une petite cour. Dans cette enceinte, creusée ou élevée, on mettra au fond un lit de paille de seigle, hachée menue, de la hauteur de quatre doigts ou demi-pied, sur icelui un lit de fumier de cheval, pur & récent, qu’on couvrira de terre légère déliée, sur laquelle on répandra du sang de bœuf ou de chèvre, du marc de raisin, de l’avoine, du son de froment, le tout mêlé ensemble ; ce fait, on retournera à la paille de seigle, & conséquemment aux autres matières ; à savoir, au fumier, à la terre qu’on disposera en litées l’une après l’autre par ordre susdit, chacune de quatre doigts d’épais ou demi-pied, en y ajoutant des autres drogueries comme dessus, & d’abondant fourrant au milieu de cette composition, des tripailles de mouton, de brebis, & d’autres bêtes, telles qu’on pourra rencontrer. Finalement, le tout sera couvert avec de forts buissons qu’on chargera avec de grosses pierres, pour en garder que les vents ne découvrent l’artifice, ni les poules aussi, commettans tel empêchement elles feroient y grattant & bequetant. La pluie donnera dessus pour faire pourrir cette composition, but d’icelle.

» Dans ce mélange, en peu de temps, s’engendrera un nombre infini de millions de vers, lesquels faudra ménager avec ordre, autrement, les laissant à discrétion, les poules les auroient tôt dévorés ».

» En bâtissant la verminière, on y laisse une porte au milieu en l’une de ses faces regardant l’orient ou le midi, laquelle on ferme avec une pierre sèche jusqu’au plus haut ; par cette porte on entame la verminière, ôtant de ses plus hautes pierres ce qui est requis pour l’ouverture, afin de distribuer aux poules la mangeaille qui en est tirée au jour la journée, selon la faculté de la verminière, & la mesure du nombre de la poulaille ; de quoi elle se plaît avec beaucoup d’affection après avoir, mangé le grain que pour l’ordinaire on lui distribue, premièrement le matin au sortir du poulailler. Un homme avec trois ou quatre coups de bêche, tire tous les matins la provision pour tout le jour, sur quoi la poulaille employe le temps, ne cessant d’y béqueter & gratter tant qu’un seul ver y paroît ; serrant cependant à part ce qui reste de la précédente journée, qui, ayant été curieusement recherché, vide de vermine, ne peut plus servir qu’au fumier[1] Toujours par un seul endroit on

  1. Note de l’Éditeur. Ce fumier est excellent pour la culture des fleurs, parce qu’il