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qu’ils deviennent beaux, il faut que les jeunes coqs soient en état d’être chaponnés avant la St. Jean. Après l’opération cet oiseau est triste & mélancolique pendant plusieurs jours. La gangrène survient quelquefois au jeune chapon lorsqu’on l’a châtré dans un temps trop chaud, ce qui le fait périr ; il meurt aussi quelquefois quand on l’a mal châtré. Il résulte de l’opération bien faite, que le chapon prend désormais plus de chair, que la chair devient plus succulente & plus délicate, qu’elle donne aux chimistes des produits différens de ceux qu’elle eût donnés avant cette opération. En effet, on lit dans les Mémoires de l’Académie, année 1730, « que l’extrait tiré de la chair du chapon dégraissé, est un peu moins du quatrième du poids total ; au lieu qu’il en fait un dixième dans le poulet & un peu plus du septième dans le coq. De plus, l’extrait de la chair du coq est très-sec, au lieu que celui du chapon est difficile à sécher. Le chapon n’est presque plus sujet à la mue, sa voix devient enrouée & il ne la fait entendre que rarement. Traité durement par les coqs, avec dédain par les poules, il est non-seulement exclus de la société de ses semblables, mais encore séparé de son espèce. Manger, dormir, s’engraisser ; voilà désormais ses principales fondctons… On donne aux chapons pour les engraisser de l’orge ou du froment, ou du son bouilli ; ou bien on leur donne une pâte faite avec la farine de mais ; le sarrasin les engraisse très-bien, ainsi que toutes les volailles. Quand on veut les engraisser vite, on les met sous une mue ; on leur fait de la lisière neuve tous les jours, & on les empâte de boulettes avec du gruau & du lait.[1] Un chapon engraisse suivant cette méthode, est un aliment d’un très-bon suc, il nourrit, restaure & se digère facilement. Un chapon, pour qu’il soit bon, doit avoir une grosse veine à côté de l’estomac, la crête polie, le ventre & le croupion gros. La graisse de chapon est fort émolliente ; on l’emploie à l’extérieur en médecine. »


CHAPITRE VI.

Des Poulardes.

On donne le nom de poularde, continue toujours M. Buc’hoz, « à une poule à laquelle on a ôté l’ovaire pour la rendre grasse & tendre, & stérile en même temps. Cette opération se pratique à peu près de la même manière que celle qui est employée pour ôter au coq ses rognons :… il y a plusieurs manières de les engraisser. 1°. On les enferme dans

  1. Note de l’Éditeur. Aujourd’hui que la culture des pommes de terre est généralement établie en France, on peut s’en servir à la place du mais encore plus cher & moins commun, dans beaucoup de cantons. La pomme de terre cuite les engraisse très-promptement, si après l’avoir fait cuire & piler, on la détrempe avec un peu de lait. Dans une ménagerie bien montée, on ne doit chaponner que les grandes espèces de coqs & conserver les petites, ou espèces communes pour pondre, attendu que les poules des grandes espèces pondent beaucoup moins ; il en est ainsi pour les poulardes ; on est sûr alors d’avoir de belles pièces & que l’on vend avec un bénéfice réel.