superbes peupliers d’Italie ; ils furent détruits & la prairie n’éprouva plus aucun mauvais effet des gelées.
Il est bien rare, dans les provinces du nord, que les prairies semées à la fin de février ou de mars, suivant le climat, aient besoin d’irrigation avant le mois de mai. Si la saison leur est favorable, si l’eau des pluies leur suffit, il est inutile d’ouvrir les rigoles, & il vaut mieux attendre l’année suivante ; à cette époque, la terre est vraiment tassée comme il convient, les racines des plantes se touchent, la superficie du sol est couverte d’herbes, & on ne craint plus que l’affouillement des eaux entraîne la terre & la fasse ébouler sur une très-grande largeur, comme il arrive très-souvent. De pareils éboulemens nécessitent de nouveaux transports de terre, de nouveaux semis, & ce n’est qu’après plusieurs années que le dégât total disparoît. On se hâte toujours trop de mettre l’eau dans la nouvelle prairie ; & on ne laisse pas, assez aux racines le temps de jouir de la terre meuble, & par conséquent de s’y enfoncer autant qu’elles le pourroient. Il en résulte qu’elles s’entremêlent obliquement & qu’elles ne tirent pas du fond de la terre la même quantité de sucs. C’est donc la manière d’être de la saison qui doit décider dans chaque climat le moment où il est avantageux de donner l’eau à la prairie. On auroit tort de conclure de ce qui vient d’être dit, qu’il faille laisser les jeunes plantes souffrir de la sécheresse, c’est tout le contraire ; la sécheresse leur est nuisible à raison de leur plus ou moins de forces & de son intensité, ce qui n’empêche pas de dire avec raison que l’eau mise trop tôt dans ces prairies est nuisible au sol & aux plantes.
J’ai dit qu’on ne devoit semer qu’une ou deux espèces de graines. On aura donc réellement une prairie homogène en plantes ; mais si au printemps on apperçoit quelques plantes étrangères, susceptibles d’acquérir un grand volume, il est indispensable de se hâter de les arracher, parce qu’une seule de ces plantes étouffera sur plus d’un pied de diamètre les graminées encore tendres qui seront dans son voisinage. Ce sont les seules auxquelles il est prudent de faire attention à cette époque, ainsi qu’aux plantes annuelles qui graineroient avant ou après la fauchaison ; mais à l’entrée de l’hiver le propriétaire redoublera de vigilance, & fera arracher toute espèce de plantes parasites, vivaces ou annuelles : c’est le travail des femmes & des enfans ; les uns & les autres ne doivent pas se servir de couteaux, ils couperoient les plantes vers le collet de la racine, & elles ne pousseroient pas moins au printemps suivant, en sorte qu’on auroit dépensé son argent en pure perte. Il vaut mieux attendre que le sol soit humide, disposer les femmes & les enfans par intervalles & sur une même file de largeur, & qu’ils tirent de terre les plantes & les racines, soit avec la main, soit au moyen d’une petite pioche ou d’une houlette, semblables à celles dont se servent les jardiniers. Il est de la dernière importance de ne rien négliger pour l’établissement d’une bonne prairie. Si malgré cela on regarde ces petits soins comme trop minutieux, ce n’est plus ma faute. J’ose dire encore & affirmer que ce sarclage est