sibles en certain temps pour l’arrosement, comprend celles qui gèlent profondément en hiver, ce qui dépend autant de la nature du terrain & de son exposition, que de la qualité de l’eau. Les eaux glaiseuses sont singulièrement susceptibles de gelée, & personne ne sauroit ignorer les funestes effets de la gelée sur les plantes chargées d’humidité.
» Il me reste à dire un mot des eaux limoneuses. Elles sont quelquefois bonnes & quelquefois mauvaises. Elles varient dans leurs effets ; leur bonté ou leur malignité dépend des substances qu’elles ont entraînées, ou de la nature des terres qu’elles doivent abreuver. Un limon visqueux ne nuit pas aux terres sablonneuses ; il rend trop compactes les terres argileuses… Je passe sous silence les eaux d’égoûts de fumier, de grands chemins, de rues, de végétaux dissous, d’immondices ; leur excellence pour l’arrosement ne sera jamais contestée.
» Celles qui charrient des terres homogènes aux terres qu’elles doivent arroser, réussissent rarement sur ces terres-là ; mais celles qui charrient des matières hétérogènes ou différentes, font un merveilleux effet. Les eaux troublées par les parties argileuses, donnent à un pré dont le sol est sablonneux, une consistance & une température qui favorisent sa fertilité, & celles qui portent des parties calcaires, ou du sable sur les terres argileuses, les raniment & les rendent plus meubles.
» Les eaux qui découlent des montagnes à la fonte des neiges sont toujours limoneuses, & constamment mauvaises. Tous nos cultivateurs, sans exception, le savent & ne manquent jamais de les détourner de leurs prairies, comme très-nuisibles… Il y a quelque chose de plus singulier encore dans ces mêmes eaux qui découlent des montagnes dans les temps de pluie. On a observé que les eaux des torrens & des rivières sont merveilleuses pour les prés au commencement de la crue, & que leur qualité s’affoiblit peu à peu jusqu’à devenir très-nuisible, sur-tout en été, quoiqu’elle continue d’être aussi trouble qu’auparavant : voici la cause de ce phénomène. Les premières eaux qui font enfler le torrent sont les pluies qui ont lavé les terres les plus prochaines sur lesquelles il n’y a ni glace ni neige. Cette eau est bonne comme toutes celles qui lavent les terres. Nos paysans l’appellent la mère-goutte ; les eaux qui suivent celles-ci, sont celles qui tombées à une plus grande distance, & sur des amas de neige ou de glace dont les hautes montagnes sont couvertes, participent de la qualité des eaux de glace & de neiges fondues.
II. Des moyens de corriger les mauvaises eaux. Je préviens que c’est toujours M. Bertrand qui parle, & quoiqu’il écrive pour la Suisse, son pays, les françois se trouveront bien de profiter de ses préceptes généraux.
» Les eaux qu’on a dans son hérittage, & qu’on peut se procurer sans
neige reste pendant un certain temps tranquille & exposée à l’air atmosphérique, elle en repompe bientôt du nouvel air, & peut-être quelque autre substance que nous ne connoissons pas. Ce qui la rend digestive, ne seroit-ce pas l’acide aérien !