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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1789, tome 8.djvu/451

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cette sage & prudente précaution ? On évite ce danger, cet embarras, cette perte presque totale de la première goutte de ce vin qui ne doit dans ce cas trouver place que dans les vins de détours, en se servant du pressoir à coffre. Il est encore d’une très-grande utilité pour les vins blancs,[1] Quoi de plus commode en effet ? on apporte les raisins dans le coffre avec les paniers, ou barillets, on n’en foule aucun au pied, on les range avec la main ; on pose des planches de volige devant & derrière le coffre & dessus les maies, ce qui forme ce que nous appelons tablier, de façon que les pressureurs marchent sur ces planches & que le vin s’écoule dessous elles sans qu’aucune saleté puisse s’y mêler, & que celui qui sort des trous des flasques puisse incommoder ni rejaillir sur les ouvriers.

À l’égard des autres pressoirs, on est obligé de tailler le marc à chaque serre avec une bêche bien tranchante[2] ; la grappe de ce raisin étant donc coupée, elle communique au vin la liqueur acide & amère qu’elle renferme, ce qui le rend âcre, surtout dans les années froides & humides.

Dans l’usage du pressoir à coffre on ne taille pas le marc, on ne tire par conséquent que le jus du raisin, & on ne doit pas douter que la qualité du vin qu’on y fait ne l’emporte de beaucoup sur toute autre, joint à ce que le vin ne rentre pas dans le marc & qu’il est fait plus diligemment.


Manœuvre du prévoir à double coffre.

Les opérations sont les mêmes que celles du seul coffre, avec la différence qu’elles se font alternativement sur les deux coffres ; c’est-à-dire, qu’en serrant l’un on desserre l’autre, & que tandis que celui qui est serré s’écoule, ce qui demande un bon quart d’heure, on travaille le marc de l’autre coffre de la façon déjà indiquée… Ce double pressoir ne demande point une double force ; c’est pourquoi il ne faut pas davantage de pressureurs que pour le seul coffre, & cependant il donne le double de vin. Ces opérations demandent une grande diligence. Moins le vin restera dans le marc, meilleur il sera. Il ne faut pas plus de deux ou trois heures pour le double marc, au lieu que dans les pressoirs à étiquets, & dans les autres il faut dix-huit à vingt heures pour leur donner une pression suffisante.[3]

Pour donner cette pression aux autres pressoirs, il faut quelquefois dix à douze hommes, s’ils ont une roue verticale, quatre hommes, au

  1. Note de l’Éditeur. Les vins blancs, dont il est question, sont faits en Champagne avec le raisin rouge seul. Il faut se hâter de le presser de peur qu’il ne fermente, car la fermentation combineroit la partie colorante & rouge avec le vin, ce qui altérerait sa couleur. Consultez l’article Vin.
  2. La doloire des tonneliers vaut beaucoup mieux.
  3. Je suis persuadé que l’auteur fixe au juste le temps nécessaire lorsqu’on se sert de son pressoir, mais il se trompe sur les autres. J’ai fait communément dans douze ou quinze heures, sur un grand pressoir à étiquet, le pressurage pour remplir 30 barriques de 220 bouteilles chacune. On ne gagne rien à avoir de petits pressoirs.