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droite, forte & sèche, que l’on assujettit à la boucle en la traversant, ou qui est retenue dans l’entaille de la pierre. Le coffre en maçonnerie est rempli de vendange telle qu’on l’apporte de la vigne jusqu’à la hauteur de la boucle. Alors on la couvre de plateaux en bois taillés de grandeur & faits pour entrer dans le coffre ; On abaisse le lévier qui excède en longueur du double de celle de la maçonnerie, & On appuye à son extrémité autant que les forces le permettent. Lorsque ce lévier commence à toucher le haut du mur de devant, on le relève & on charge la pressée avec de nouveaux plateaux semblables aux premiers, & ainsi de suite, autant que le befoin l’exige. Les forces des hommes ont alors peu d’activité, & pour y suppléer, on charge l’extrémité du lévier avec de grosses pierres que l’on y maintient par des cordes. Ce lévier fait l’effet du fléau que l’on nomme Romaine. Si on compare ce pressoir avec celui de M. Legros, ou avec celui à étiquet on trouvera une grande différence dans les résultats de la pression ; mais on n’admirera pas moins l’industrie de ces pauvres intéressans insulaires.


CHAPITRE II.

De la manière d’élever & de conduire une pressée.

La plus grande propreté doit régner dans le local, vulgairement nommé Cuvier, Pressoir ; elle n’est pas moins essentielle pour tous les objets qu’il renferme. Cellier (consultez ce mot) est la dénomination exacte pour désigner ce local. Quelques jours avant la vendange on jette de l’eau sur les cuves, sur les pressoirs, & sur tous les autres vases dont on est à la veille de se servir. Cette eau, que l’on change au moins chaque jour, produit un double effet, celui de faire renfler les bois des vaisseaux, & par conséquent de les mettre dans le cas de ne pas laisser couler le fluide qu’on leur confiera, &celui de détremper toutes les ordures, & de céder aux frottemens qui doivent les entraîner avec l’eau que l’on rejette. Cette grande propreté est de rigueur, parce que tout corps étranger est nuisible au vin, & lui communique une odeur ou une saveur désagréable, & dont on chercheroit vainement la cause ailleurs. Les vignerons, les valets regardent ces prévoyances comme déplacées, ou comme inutiles ; dès-lors le propriétaire est forcé de tout voir, & de faire tout approprier sous ses yeux.

Il faut cinq hommes pour monter une pressée ordinaire, & le double, si elle est considérable. Deux sont placés dans la cuve, leur fonction consiste à remplir les bannes, bennes, benots ou comportes, &c. avec le marc ; à recevoir la banne vide que leur présente le porteur ; à soulever sur le bord de la cuve la banne pleine de marc, & à l’y maintenir jusqu’à ce que le porteur l’ait enlevée. On établit communément, & cela accélère le travail, un chantier qui porte sur le bord de la maie du pressoir, & correspond solidement à la cuve. Ce chantier est plus ou moins élevé ou abaissé suivant la grandeur