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qui arrive lorsqu’ils ont atteint leur parfait accroissement ; mais les uns & les autres n’y parviennent qu’après avoir changé plusieurs fois de peau.

Il y a certains insectes qui ont beaucoup de ressemblance avec les pucerons, & que M. de Réaumur a nommés par cette raison faux-pucerons. Comme les pucerons, ils se tiennent attroupés sur les plantes & en pompent le suc ; ils y font naître diverses excroissances ; mais ce qui les différencie, c’est que leur corps est plus aplati que ne l’est celui des vrais pucerons, leurs jambes sont aussi plus courtes, & ce qui est plus essentiel, ils parviennent tous à prendre des ailes. Le buis en nourrit une espèce dont les excrémens prennent la forme d’une langue queue que ces petits insectes traînent après eux.

La plus grande diversité qu’on observe entre les différentes espèces le pucerons est dans la couleur ; il y en a de vertes, de jaunes, de brunes, de noires, de blanches. Les unes ont une couleur matte, celle des autres a une sorte d’éclat ; mais souvent cet éclat est dû à un petit ver que le puceron nourrit dans son intérieur & qui lui donne la mort. Enfin quelques espèces sont joliment tachetées, tantôt de brun & de blanc, tantôt de vert, de noir, ou d’autres couleurs.

Les pucerons forment une classe de petits animaux dont la nature a prodigieusement multiplié les espèces. Leur nombre n’est peut-être pas inférieur à celui des plantes ; car si, comme le remarque M. de Réaumur, il n’est pas sûr que chaque espèce de plante ait son espèce particulière de pucerons, il est certain seulement qu’en général, des plantes de différentes espèces ont différentes espèces de pucerons, & que souvent plusieurs sortes de pucerons aiment la même plante. Non-seulement, il y en a qui vivent sur les fleurs, sur les feuilles, sur les tiges, mais il y en a aussi qui vivent sous terre & s’attachent aux racines.

J’ai dit que les pucerons causent diverses altérations dans les plantes : les plus remarquables sont ces grosses vessies communes sur les ormes. La matière dont elles sont produites est extrêmement digne d’attention. Il n’en est pas de ces vessies comme des galles, (consultez ce mot) qui s’élèvent sur tant d’espèces d’arbres & de plantes ; celles-ci doivent leur naissance à une mouche qui a piqué quelques parties de la plante, & y a déposé un eu plusieurs œufs ; autour de ces œufs il se forme une excroissance, une tubérosité qui grossit journellement. Les vessies sont de même occasionnées par des piqûres ; mais l’insecte qui les fait, se laisse renfermer dans la tumeur qu’il a excitée ; là, il jette les fondemens d’une petite république ; les petits qu’il y met au jour, donnent à leur tour naissance à d’autres ; à mesure que le nombre des pucerons augmente, la tumeur acquiert plus de capacité, les piqûres de ces petits insectes, réitérées en tout sens, déterminent le suc nourricier à s’y porter plus abondamment qu’ailleurs & à s’y distribuer à peu près également dans tous les points ; de là, l’augmentation du volume de la vessie, & sa configuration : enfin elle s’ouvre & on en voit sortir des millions de pucerons. On trouve souvent dans ces vessies, une certaine