Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/191

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où trouver cette égalité de circonstances ? & quand même on la trouveroit, le point vraiment difficile pour l’exécution, seroit de soumettre l’esprit d’un paysan à s’en servir. Il y a plus ; quand même il l’adopteroit, elle seroit bientôt brisée & anéantie par sa gaucherie. L’expérience du passé justifie cette assertion. Pour qu’un cultivateur conduise avec succès une machine, une charrue nouvelle, &c. il est indispensable qu’il l’ait vue & maniée depuis l’enfance, & que ce soit le premier instrument dont il se soit servi ; alors son esprit & ses mains seront accoutumés à l’ouvrage. On citera des exceptions à cette assertion générale, mais je demande aux cultivateurs, si ce n’est pas par ces exceptons mêmes que la vérité de mon assertion générale est prouvée dans les campagnes. Les cultivateurs du cabinet n’en jugeront pas ainsi, & ce n’est pas leur approbation que je demande,

Lucatollo, espagnol de nation, sur a fin du siècle dernier, voulut imiter la culture des chinois, & à cet effet, il inventa ou modifia un de leur semoir. Le plan de sa machine fut envoyé à la Société royale de Londres, & il en fait mention dans la Collection de ses mémoires. C’est sans doute d’après cette instruction que M. Tull, anglois, donna une sorte de célébrité aux semoirs, & il en avoit besoin pour perfectionner la méthode nouvelle d’agriculture qu’il publia dans l’idiome de son pays, & que M. Duhamel fit connoitre en France en 1750, dans l’ouvrage intitulé : Traité de la culture des terres suivant les principes de M. Tull. La base du système de l’auteur anglois est l’atténuation des terres à grains, semblable à celle du sol de nos jardins potagers, & de suppléer les engrais par les labours multipliés. Ce n’est pas le cas de discuter ici la bonté ou la nullité complette de ce sustème qui suppose des travaux & des frais immenses avant d’avoir enlever tous les cailloux & toutes les pierres d’un champ, de l’avoir purgé de toute racine, d’avoir, pour ainsi dire, nivelé la surface au cordeau. En supposant un champ dans ce cas, en supposant encore que les labours suppléent les engrais, (consultez"" les articles Amendement, Sève, &c.), en supposant encore qu’on compte pour peu les champs établies sur les coteaux & sur les pentes des montagnes, il est assez bien prouvé que le semoir économise sur la quantité de grains que le cultivateur répand sur son champ. (Voyez l’article semaille, Froment, &c.)

L’ouvrage de M. Duhamel r&éveilla l’attention de tous les cultivateurs & grands propriétaires. Chacun voulut avoir un semoir & obtenir la gloire de perfectionner celui de M. Tull. M. Duhamel en imagina plusieurs ; alors on offrit à la curiosité publique, les semoirs à tambour, les semoirs à cylindre, les semoirs à palettes ; MM. de Châteauxvieux, de Montésui, Diancour, Thomé, Blanchet, de Villiers, &c. parurent avec honneur par la perfection qu’ils donnèrent à leurs semoirs ; enfin M. Soumille, d’Avignon, est à-peu-près le dernier qui ait innové dans ce genre, & qui ait porté la machine à se plus grande simplicité. Cependant elle a encore ses défauts.

Pendant ce temps-là, c’est-à-dire