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presque sec, on passera une couche de céruse broyée a l’huile. Ces vitres auront, suivant les dimensions des chassis ci-dessus, de onze à quatorze pouces de largeur, sur le plus de hauteur possible, afin qu’il y ait moins de recouvremens : plus larges, elles seroient avantageuses pour la serre, & moins pour le propriétaire en cas de fracture,

J’aurois pu laisser ces petits détails avec plusieurs autres que j’omets comme superflus pour ceux qui ont un peu d’adresse & d’intelligence, mais je le répète encore, je n’écris pas pour les jardiniers & les cultivateurs instruits.

VII. Tannée. Il ne suffit pas aux plantes de la zone torride d’être environnées d’un air chaud. La plupart ne feroient point de progrès, quelques-unes ne pourroient pas même vivre, si leurs racines ne trouvoient pas dans la terre le degré de chaleur de leur sol naturel. Pour leur procurer ce dernier avantage, on a imaginé de plonger dans une couche chaude les pots dans lesquels elles sont plantées. Cette couche pourroit être faite de bon fumier neuf, mais l’expérience a appris que le tan lui est bien préférable ; parce que si la chaleur est moins forte, elle persiste & se soutient bien plus long-temps ; & d’ailleurs il s’élève du tan beaucoup moins de vapeurs humides, très nuisibles à ces plantes originaires d’un climat dont l’atmosphère est fort sèche.

Le tan employé à cet usage n’est pas celui qui sort du moulin, mais celui qui a servi à préparer les cuirs ; cependant les jardiniers le nomment tan neuf, lorsqu’il n’a point encore servi à faire des couches. On doit l’employer peu de temps (au plus 10 ou 12 jours) après qu’il a été tiré des fosses des tanneurs. S’il est trop humide, on l’étend pendant quelques jours au soleil, ou au moins à un air sec, sous un hangard, & on le retourne plusieurs fois ; car trop d’humidité comme trop de sécheresse l’empêcheroit de fermenter. Le tan qui n’a été pilé que grossièrement, est lent à s’échauffer, mais il acquiert une chaleur excessive, qui est aussi lente à se modérer. Celui qui a été broyé trop fin, se pourrit & se consomme bientôt, & par conséquent ne conserve pas long-temps sa chaleur. Celui qui tient le milieu est donc préférable ; mais comme sauvent on ne peut choisir, & qu’on est obligé de l’employer tel qu’on le trouve chez les tanneurs, le jardinier soignera sa couche relativement à la qualité du tan qui, au surplus, doit avoir conservé sa couleur ; car s’il étoit noir, ce seroit une marque qu’il seroit pourri & inepte à fermenter. Une couche bien faite avec du tan de bonne qualité, peut conserver sa chaleur environ trois mois. Alors, si on remue tout le tan, si l’on brise & divise bien toutes les mottes qui se sont formées, elle se ranimera encore pendant quelque temps. Si ensuite on remanie encore le tan, & qu’on y mêle du tan neuf tenu 7 ou 8 jours en un lieu sec, afin qu’il n’ait pas d’humidité qui refroidiroit le vieux au lieu de le réchauffer, on prolongera sa chaleur pendant environ deux mois. Ainsi les couches de tan ont encore sur celles de fumier, l’avantage d’avoir plus rarement besoin d’être remaniées & réchauffées. Dans les couches neuves, on met ordinairement avec le tan