Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/25

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chent Dès qu’un oignon est attaqué de cette maladie, il devient contagieux & meurtrier pour les oignons voisins. Cette maladie se communiquant de proche en proche, fait périr tous les oignons dans un espace circulaire dont le premier oignon attaqué est le centre, & en même temps le foyer… Si on plante par mégarde un oignon malade dans un champ sain, la maladie s’y établit en peu de temps, & fait les mêmes ravages que nous venons de dire. Ce n’est pas encore tout, une pellée de terre prise dans un endroit infecté, & jetée sur un champ dont les plantes sont saines, y porte la contagion.

On ne connoît point de remèdes pour les oignons attaqués de cette maladie ; on sait seulement les en préserver par la même précaution que l’on emploie pour arrêter les progrès de la peste. Pour cet effet on fouille, dans le mois de mai, tout autour des endroits infectés, des tranchées profondes d’un pied, & l’on jette la terre que l’on en tire, sur celle où les oignons sont morts. En coupant ainsi la communication entre les oignons sains & ceux qui sont malades, on parvient à arrêter les progrès de la contagion, qui est telle, qu’en une année de temps, un seul oignon infecté fait périr ceux qui l’entourent à un pied de distance. Ils y a encore une circonstance bien singulière, c’est que l’impression de cette contagion reste tellement adhérente au terrain, que le soignons sains qu’on voudroit y planter après douze, quinze ou vingt ans, se trouveroient en peu de temps attaqués de cette même maladie.

La Rochefoucault, qui, comme je l’ai dit, a confondu toutes les maladies du safran, assure que quand cette plante à pourri dans une terre, elle y laisse une infection & une odeur maligne qui existe assez longtemps pour faire pourrir le safran qu’on y replante. M. Duhamel a observé que les oignons du centre se trouvoient totalement détruits. Leurs enveloppes étoient d’un brun terreux fort désagréable à la vue. Une grande quantité de corps glanduleux, gros comme des fèves, & d’un rouge obscur les couvroit extérieurement. Le corps de l’oignon étoit réduit en une substance terreuse dans laquelle on appercevoit les principales fibres de la bulbe… Les oignons de la circonférence qui étoient les moins attaqués de la maladie, n’avoient d’autres marques de la contagion, que quelques fibres violettes qui traversoient les membranes de leurs tégumens. Quelques-autres avoient sur leurs tégumens & entre les lames qui les forment, quelques-uns de ces corps glanduleux dont il est question, & on n’apercevoit sur les enveloppes de ces oignons que quelques taches violettes… Les oignons qui étoient à la partie moyenne, c’est-à-dire entre le centre & la circonférence des endroits infectés, étoient dans un état mitoyen de maladie ; mais la tare étoit entièrement traversée par des filets violets extremement déliés & aisés à rompre.

Ces corps glanduleux ressemblent assez a de petites trufes ; mais leur superficie est velue : leur grosseur n’excède pas celle d’une noisette. Ils ont l’odeur du champignon avec un retour terreux, sont adhérens aux oignons de safran, & les autres en sont éloignés de deux à trois pouces.