Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1796, tome 9.djvu/464

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ce qui seroit une perte réelle pour lui. L’ouvrier a bien plutôt établi un vaisseau de quinze à vingt douves, qu’un pareil vaisseau où il en faudra cinquante. Vingt douves sont plutôt dolées & dressées sur le banc, que cinquante ; mais comme il paye le travail du doleur par cent, par millier, moins il y a de pièces & plus de largeur, plus le tonnelier gagne ; d’où il résulte qu’il ne rejette jamais les douves disproportionnées en largeur.

Je prendrai pour exemple un vaisseau vinaire de deux pieds six pouces de diamètre, & par conséquent de sept pieds six pouces de circonférence à chaque tête. Il n’est pas question, dans cet exemple, de la diminution ordinaire des deux extrémités des douves, d’où résulte la courbure ou bouge ; en supposant toutes les douves de six pouces de largeur, il en faudra seize pour former la circonférence, & un peu moins de cinq de même largeur pour chaque fond. Que l’on examine à présent combien les angles seroient saillans, si l’ouvrier n’avoit la précaution de les abattre en diminuant le bois. Cette opération détruit les angles en dehors ; mais ils n’existent pas moins dans l’intérieur. Supposons ce même tonneau E, monté & garni à son extrémité, seulement de deux cerceaux nommés sommiers ou têtards : examinons placer successivement les autres que le tonnelier chasse avec force, & nous verrons que ces cerceaux ne toucheront directement que sur AB, Planche XV. figure 1. Ce sera sur ces deux angles qu’ils presseront vivement : cependant leur pression agira laréralement & se communiquera jusqu’à C ; alors C, humecté par le vin, & de l’autre, pressé par AB, sera contraint de se coffiner comme on le voit en D : ou bien si le bords des douves dont on aura trop diminué le bois, opposent moins de résistance, la vive pression du cerceau & leur foiblesse, les obligera de se coffiner à leur point de réunion F. Que l’on compare actuellement les angles que présenteroient des douves de trois pouces de largeur, ils seront de moitié moins grands, & l’ouvrier ne sera plus contraint de mutiler son bois pour trouver la rondeur du vaisseau : ces exemples sont trop journaliers pour exiger d’autres démonstrations.

Les mêmes inconvéniens arriveront aux douves de fond, avec cette différence néanmoins, que ces douves se coffineront plutôt en dehors qu’en dedans, parce que leurs extrémités n’étant retenues que par la jarre ou table, & que toutes leurs parties intérieures étant pressées par le vin & sur tout par l’air qui cherche á se débander lorsqu’il travaille, il est nécessaire qu’elles chassent en dehors. On y remédie de trois manières, ou en barrant le fond du vaisseau, ou en enlevant la douve coffinée, ou en remettant un autre fond : l’acheteur plus attentif auroit évité cette dépense.

Il seroit plus prudent de faire barrer le fond avant de mettre le vin dans le tonneau, sur-tout si les douves sont trop larges, si le bois est trop mince, & s’il a été assemblé à la manière accoutumée. Mais M. de Fougeroux observe très-bien que le tonnelier a de bonnes raisons pour ne placer la barre que lorsque les bois imbibés ont fait leur effet.

1°. Il est avantageux que le bois soit humide & gonflé pour former sur l’extrémité des douves les trous qui doivent porter les chevilles de la