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de la substance du végétal, devient chrysalide, & enfin sort de terre dans son état parfait de mouche. L’endroit de la truffe piqué du vers, est plus noir que le reste de sa substance, & contracte une saveur amère très-caractérisée. L’extérieur ou écorce chagrinée de la truffe, est souvent parsemée de petits points blancs ; ce sont autant d’insectes à-peu-près semblables aux mittes, qui se nourrissent sur sa superficie, comme les pucerons sur l’écorce des feuilles ou des jeunes tiges, & souvent pénètrent & se rassemblent dans le nid d’où la mouche est sortie pour venir folâtrer dans l’air & s’accoupler, afin de perpétuer son espèce. Plusieurs naturalistes ont mal-à-propos considéré ces points blancs comme les parties constituantes de la fleuraison de la truffe.

M. Meunier dans l’ouvrage cité, décrit ainsi la manière de récolter les truffes dans l’Angoumois. « L’expérience a fixé les trois manières de tirer les truffes du sein de la terre. On les cherche à la marque, au pic & au cochon. On emploie la première méthode avant les vendanges. Les truffes croissent à différentes profondeurs. Celles qui sont les plus près de la surface de la terre, la fendent, la soulèvent en grossissant, de manière qu’elle est assez sensiblement bossuée, pour que des yeux assez experts distinguent ce travail de la nature, de toute autre inégalité qui n’auroit point la même cause pour principe. On la découvre & on la trouve placée comme une pierre ronde qui seroit dans la terre. La truffe étant encore blanche, n’ayant presque ni goût ni odeur, il est dommage de troubler sa tranquille végétation. Lorsqu’elle est une fois déplacée, on la repose inutilement dans sa loge ; elle pourrit, quelque précaution que l’on prenne pour la remettre exactement dans la même position. Ces soulèvemens de terre, indicateurs des truffes, sont affaissés par les pluies, alors on ne les trouve plus à la marque ».

Le pic fait plus de ravages : aussitôt que les vendanges sont faites, les paysans se répandent dans les campagnes pour ouvrir la terre, dans les endroits où ils soupçonnent qu’il y a des truffes. Les truffières restent à peu-près dans le même emplacement pendant plusieurs années consécutives ; elles sont presque toujours connues. Les paysans commencent d’abord à fouiller dans les endroits qui ne paroissent couverts d’aucune plante : s’ils trouvent, selon leur expression, une belle terre, c’est-à dire, si elle est pure, & qu’ils n’y rencontrent aucune racine vivace, c’est une marque presque infaillible de la présence des truffes ; s’ils rencontrent, au contraire, quelques petits végétaux, sur-tout de petits champignons, ils fouillent d’un autre côté, en suivant toujours les meilleures veines. On cherche les truffes de cette manière jusqu’à la fin du mois de novembre ; alors le pic est insuffisant, & le produit ne le dédommageroit pas de la perte du temps. Cet instrument ne peut découvrir les truffières nouvelles ; il en périt, & il s’en forme tous les ans. Lorsque les truffes ont de l’odeur & un parfum qui peut déceler leur position, on les suit, pour ainsi dire, à la piste, & le meilleur odorat que l’on ait employé pour les trouver, est celui du cochon.