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le matin & le soir. Depuis sept heures du matin jusqu’à neuf, c’est le temps où l’on trouve le plus de vers éclos. Les Chinois portent l’attention pour les levées jusqu’au scrupule, car ils les font toutes les heures. Faire une levée, c’est prendre sur la boîte, où est la graine, tous les vers montés sur les feuilles ; il ne faut pas les prendre avec les doigts, mais avec une épingle très-longue, afin de ne pas les toucher, pour ne pas risquer de les blesser.

Les vers des boîtes numérotées ne doivent point être mêlés : on parvient à les égaliser, c’est-à-dire, à les faire muer à-peu-près dans le même temps, par l’ordre des données. Voici comment on s’y prend. Lorsque tous les vers sont éclos & placés dans les boîtes numérotées suivant l’ordre de leur naissance, on donne à manger aux vers, en commençant par le dernier numéro, jusqu’à ce qu’on arrive au premier. On comprend, à présent, l’utilité de numéroter les boîtes. Lorsque la couvée a bien réussi, il est rare qu’en suivant le procédé que je viens d’indiquer, on ne parvienne pas à faire muer les vers dans le même temps ; s’il y a beaucoup de différence dans les levées, il faut en mettre dans les données, c’est-à-dire, donner une demi-heure ou une heure plus tard aux premiers qu’aux derniers.

Quoiqu’on soit très-attentif au degré de chaleur qui est nécessaire pour faire éclore les vers à soie, il est non-seulement très-rare, mais il n’arrive jamais qu’ils éclosent en même temps ; après le second jour, on n’a plus que des traînards : ainsi je suis d’avis qu’après avoir fait des levées, pendant deux jours, il faut jeter le reste de la graine, qui exigeroit des soins minutieux, sans qu’il en résultât un avantage capable d’en dédommager. Pour cette raison, il faut toujours mettre un tiers de graine de plus ; c’est-à-dite, si on veut une nourriture de deux onces, il faut en mettre trois, parce que dans une masse de graine, tous les œufs ne sont pas également féconds ; une partie peut être desséchée par l’évaporation : d’ailleurs, comme je l’ai dit, malgré tous les soins qu’on prend, tous les vers n’éclosent pas en même temps, il y a toujours des traînards ou tardifs, qu’il faut sacrifier.

Ce qui contribue beaucoup à avoir des vers tardifs, c’est l’épaisseur de la graine dans les boîtes ou dans les nouets. Il est presque impossible alors de procurer le même degré de chaleur à tous les œufs : les vers qui se trouvent au fond, ont de la peine à gagner la surface, pour passer par les trous du papier & monter sur la feuille ; ils peuvent être les premiers éclos & les derniers levés. Je ne puis donc trop recommander de bien égaliser la graine dans les boîtes ; qu’elle n’y soit point pressée ni trop épaisse, & qu’elle soit remuée deux fois par jour, comme je l’ai dit plus haut. Ces soins paroissent minutieux, mais ils sont très-importans pour avoir une bonne éducation ; il n’y a que l’expérience qui puisse en faire connoître la nécessité, & je suis bien assuré d’avoir l’approbation des personnes qui font des éducations.