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naturalisées par-tout, excepté dans les expositions très-chaudes. Ils ne formeront jamais, il est vrai, des forêts aussi majestueuse ; que celles qui croissent spontanément à 900 toises au-dessus du niveau de la mer, mais ces forêts seront toujours d’une très-grande utilité.

Il n’en est pas ainsi, si l’on monte à une certaine élévation, & proche du sommet des montagnes les plus élevées. On trouve au-dessus de la région des sapins, celle des mélèses, des Alvies, & ceux-ci, à leur tour, ne sauroient croître dans une région plus élevée. Il est démontré qu’à mesure que ces arbres végètent dans un sol au-dessus de la ligne de démarcation en hauteur que la nature leur a indiquée, ils rabougrissent ; & le sapin altier y devient une espèce d’arbre nain. On pourroit, absolument parlant, calculer la hauteur des montagnes par la nature des arbres qui y vivent. Dans la région inférieure, le chêne ; dans celle au-dessus, le hêtre ; dans la troisième, le sapin ; dans la quatrième, l’alvies, le mélèse ; la cinquième est destinée aux pâturages, & au-dessus des pâturages, les neiges & les glaces éternelles. Ces arbres peuvent descendre dans les régions inférieures, & y réussir, comme on l’a démontré à l’article mélèse, mais ils ne peuvent pas gagner une région plus élevée. Les Pyrénées, les Alpes, les Jurats, les Vosges, fournissent la preuve de cette assertion.

Le sapin aime les expositions au Nord, les terres fraîches & qui ont du fond, ou qui reposent-sur le rocher a larges & profondes scissures, obliques ou perpendiculaires. Si les racines rencontrent le rocher, elles tracent, s’étendent sur sa surface, jusqu’à ce qu’elles puissent plonger dans une de ces scissures ou crevasses.

Le sol des anciennes sapinières n’est sur toute sa superficie qu’un amas de terre végétale, formé par la pourriture des vieux troncs, des vieilles racines, & sur-tout par celle des branches inférieures des sapins, qui meurent à mesure que l’arbre gagne en hauteur.

1. Du choix de la semence. C’est en janvier, février & mars qu’on cueille les cônes des sapins ; à cette époque les écailles qui forment chaque cône sont fortement réunies par un gluten résineux, dont la destination est d’empêcher que les eaux pluviales ou la neige ne pénètrent dans l’intérieur ; ce cône est le berceau qui renferme l’amande ou graine. Lorsque par la maturité les écailles se dessèchent, elles s’ouvrent & la graine tombe ; c’est le moment où les écureuils, qui sont très-friands de cette nourriture, s’en emparent. Les cônes restent sur l’arbre malgré leur maturité, & le rapprochement de leurs écailles pourroit servir d’hygromètre ; si le temps est très-humide, on croiroit que la semence est encore renfermée dans le cône ; si le temps est sec, les écailles sont ouvertes & séparées.

Il y a plusieurs manières de faire sortir la graine des cônes ; on les met dans un four modérément chauffé, & la chaleur fait ouvrir les cônes ; cette opération est délicate, un peu trop de chaleur agit sur la semence, & on a beau la semer ensuite avec le plus grand soin, elle ne lève pas ; il vaut beaucoup mieux exposer les cônes dans des caisses ouvertes par-dessus, à la rosée & à la vive ar-