Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1800, tome 10.djvu/117

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connoître, ce sont le lieu et le climat d’où elle a été tirée, et comment, de proche en proche, on est parvenu à rendre sa culture si familière aux habitans des régions tempérées de l’Europe. L’absolue nécessité de cette connoissance n’est point particulière à la vigne ; elle s’étend à toutes les familles de végétaux, dont se compose notre agriculture ; parce que les plantes partagent avec les animaux cet instinct, ce secret penchant, si j’ose m’exprimer ainsi, qui les rappelle sans cesse vers leur terre natale. Le cultivateur vigneron sur-tout ne peut rien faire de trop pour assimiler le sol sur lequel il travaille, et la température de l’atmosphère dans laquelle il s’exerce, à ceux de cette terre natale dont nous venons de parler. De là, l’indispensable nécessité non seulement de bien choisir, avant de planter, la nature, la forme et la position du terrain, de raisonner le nombre des labours, la manière et le temps de les donner ; mais de savoir prescrire aux ceps une hauteur relative aux circonstances locales, restreindre ou multiplier à propos le nombre et l’étendue des canaux séveux ; enfin, maintenir les sarmens dans un ordre et une direction tels que les vues de la nature, et les efforts du vigneron, se secondent sans cesse mutuellement, les unes pour produire, les autres pour obtenir des baies parvenues au plus haut degré possible de la maturité vinaire

Ce peu de mots renferme tous les principes de l’art du vigneron. Il s’agit de les développer : c’est là du moins le but que nous nous sommes proposé. Cette tâche est délicate sans doute ; elle l’est en raison du grand intérêt public que les Français doivent attacher à ce sujet ; aussi avons-nous hésité à prendre la plume. Nous ne nous y sommes déterminés qu’après avoir long-temps agi et médité, nous être familiarisés avec le petit nombre de bons ouvrages qui traitent de la culture de la vigne, avec ceux de Rozier, ce célèbre et malheureux citoyen qui a tant fait pour les progrès de l’agriculture française, et que le destin a si rigoureusement traité. Toutes les vraisemblances vouloient qu’il eût rédigé lui-même cet article ; mais la fortune en a autrement ordonné. Toutefois Rozier n’a point cessé d’être ici notre collaborateur ; nous nous sommes fait un devoir d’identifier notre foible travail avec ses utiles travaux ; nous avons religieusement conservé tous ceux de ses principes, ou qui ont été confirmés, ou qui n’ont pas été détruits par les nouvelles découvertes qu’ont faites parmi nous, depuis quelques années, les sciences physiques ; nous avons même cru devoir employer jusqu’à ses propres expressions quand nous avons eu à décrire des objets déjà décrits par lui, ou à manifester des idées qu’il avoit déjà développées lui même. Qu’un écrivain agricole imagine, ou qu’il préconise des procédés utiles, peu importe ; son droit à l’estime publique sera toujours en raison du bien qu’aura produit son livre.

Je ne terminerai point ce préliminaire sans parler des obliga-