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leau parle de cet Auvernat d’une manière bien différente, quand il dit :

Un laquais effronté m’apporte un rouge bord
D’un auvernat fameux, qui, mêlé de lignage,
Se vendoit chez Crenet[1] pour vin de l’ermitage ;
Et qui rouge et vermeil, mais fade et doucereux,
N’avoit rien qu’un goût plat, et qu’un déboire affreux.

Hamilton ne s’exprime pas sur ces vins d’une manière plus avantageuse.

… Le vin dont les dieux vont buvant,
Auprès du vôtre en parallèle,
Paroîtroit du vin d’Orléans.

Ces satyriques ne connoissoient pas sans doute ceux de Saint-Denis-en-Val, de Saint-Jean et de Saint-Y dont la réputation existoit cependant au tems où ils s’égayoient de cette sorte, et se maintient encore de nos jours. Pierre Gautier de Roanne, parlant des qualités des différens vins de France dans ses Exercitationes hygiasticæ, publiée en 1668 et citées par Tessier[2], entr’autres de ceux d’Orléans, de Bourgogne, de Gascogne, d’Anjou, de Champagne et des environs de Paris, dit que les premiers ont peu de corps et cependant qu’ils sont généreux, spiritueux et très-bons à leur seconde année. Il est assez remarquable, ajoute-t-il, que tout distingués qu’ils sont par un goût

    Mantes ; pour l’Orléanois, lisez le texte ; pour la Provence, Cassos, la Cioutat et St.-Laurent ; pour la Touraine, Amboise, Azai-le-Feron, Bléré, Bouchet, la Bourdaisière, Claveau-la-Folaine, Maillé, Mezières, Montrichard, Mont-Louis, Nazelles, Noissai, Plaudet, St.-Avertin, Vérets, Vernou et Vouvrai.

    Le lecteur a sans doute remarqué combien est nombreuse la liste que l’abbé de Marolles nous présente des bons crûs de la Touraine, et combien est resserrée celle de la Bourgogne, de la Champagne et du Bordelais ; mais l’auteur étoit Tourangeau.

    Olivier de Serres, lui-même, n’a pas été tout-à-fait exempt de cette petite foiblesse ; car dans la nomenclature qu’il a laissée des principaux vins de France, ceux du Midi s’y trouvent dans une proportion presque ridicule, comparés à ceux de nos départemens du centre et du Nord-Est. En voici le propre texte : « Les excellens vins blancs d’Orléans, de Couci, de Loudun en Languedoc, d’Anjou, de Beaune, de Joyeuse, de l’Argentière, de Montréal, de Lambras, de Cornas en nostre Vivaretz, de Gaillac, de Rabastens, de Nérac, d’Aunis, de Grave. Les friands vins-clérets de Cante-Perdix, terroir de Beaucaire ; de Castelnau, de Moussen Giraud, de Baignols, de Montelimar, de Villeneuve-de-Berg ma patrie, de Tournon, de Ris, d’Aï, d’Arbois, de Bordeaux, de la Rochelle et autres diverses ; ortes croissans aux provinces de Bourgogne, d’Anjou, du Maine, de Guyenne, de Gascogne, du Languedoc, du Dauphiné, de la Provence. Sur tous lesquels vins paroissent les muscats et blanquettes de Frontignan, et Miranaux en Languedoc, dont la valeur les fait transporter par tous les recoins de ce royaume ». Théâtre d’agriculture.

  1. C’est le nom de celui qui tenoit alors à Paris, le fameux cabaret de la Pomme de Pin, près le pont Notre-Dame.
  2. Annales de l’Agriculture française, tom. II pag. 295.