Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1800, tome 10.djvu/325

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est originaire des climats chauds de l’Asie ; le froid est son ennemi le plus redoutable, disposer ses racines de manière à être mises en contact avec la glace, le givre, les frimats, c’est lui préparer un traitement tout-à-fait opposé à sa nature. Loin de tourmenter ses racines en exécutant le labour, il faut au contraire que l’instrument qu’on emploie ne fasse, pour ainsi dire que planer sur la terre qui avoisine le cep de plus près. La forme de l’instrument dont on se sert doit varier comme la nature du terrein. La bêche, par exemple, ne peut pénétrer un sol rude et pierreux ; d’ailleurs, la surface de son tranchant est trop étendu pour qu’on ne risque pas sans cesse de meurtrir un grand nombre de racines.

On en fait usage cependant dans quelques-uns de nos vignobles du Nord ; et nous convenons l’avoir vu employer en terre douce avec tant de dextérité, qu’il en résultoit un excellent travail ; mais les ouvriers aussi adroits, aussi soigneux que ceux par qui elle étoit dirigée, sont, en général, si rares, qu’on ne peut en conseiller l’usage pour le labour des vignes.

L’effet de la fourche est presque nul dans un sol propre à cette plante : la terre s’échappe de tous côtés à travers les branches qui la composent. Le crochet n’est pas dangereux ; mais il exécute mal ; il ne remue pas assez la terre ; il ne la déplace pas, il ne fait que la sillonner. De tous les instrumens de labour, le plus propre à celui de la vigne, c’est la houe. Mais la houe se modifie de trois ou quatre manières ; savoir ; la houe commune ou presque quarrée, la houe triangulaire ou en forme de truelle, la houe bifurquée et la houe à trois branches. Il s’agit de bien appliquer, et pour la commodité de l’ouvrier et pour la perfection du travail, l’une de ces formes à l’espèce de terre qu’on laboure ; et, comme la nature de la terre varie souvent dans le même vignoble, dans la même vigne, il est rare qu’une seule de ces normes suffise pour bien exécuter le labour d’une vigne d’une certaine étendue. La houe commune est préférable aux autres dans une terre douce ; la houe triangulaire convient aux terres grouetteuses ; et celles à deux ou trois divisions, aux serres plus ou moins pierreuses ou caillouteuses.

Pour commencer le premier labour, je suppose la vigne en pente et ayant l’exposition du Sud, l’ouvrier se place au plus haut point du coteau et de manière à s’acheminer en travers de la pente, comme je l’ai déjà dit. S’il a le Midi à sa droite, il tire la terre un peu obliquement de bas en haut et, par conséquent, de droite à gauche. Quand il est au bout de la première rangée, il ne revient point sur ses pas pour commencer la seconde, mais il entre sur-le-champ dans la deuxième. Ayant dans cette position le soleil à sa gauche, il tire la terre obliquement à lui de bas en haut et de droite à gauche. Ce travail étant exécuté dans toute l’étendue de la vigne, sa surface doit présenter une suite non interrompue de petits sillons qui se