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du cellier. Il est d’autant plus dangereux, qu’il est invisible comme l’air ; et l’on ne sauroit trop se précautionner contre ses funestes effets. Pour s’assurer qu’on ne court aucun risque en pénétrant dans le lieu où fermente la vendange, il faut avoir l’attention de porter une bougie allumée en avant de sa personne : il n’y a pas de danger tant que la bougie brûle ; mais, lorsqu’on la voit s’affoiblir ou s’éteindre, il faut s’éloigner avec prudence.

On peut prévenir ce danger, en saturant le gaz à mesure qu’il se précipite sur le sol de l’atelier, en disposant sur plusieurs points du lait de chaux ou de la chaux vive. On peut parvenir à désinfecter un lieu vicié par cette mortelle moffète, en projetant sur le sol et contre les murs de la chaux vive délayée et fusée dans l’eau. Une lessive alkaline caustique, telle que la lessive des savonniers, l’ammoniaque, produiroient de semblables effets ; dans tous ces cas, l’acide gazeux se combine instantanément avec ces matières, et l’air extérieur se précipite pour en occuper la place.


3°. formation de l’alkool.

Le principe sucré existe dans le moût, et en fait un des principaux caractères : il disparoît par la fermentation, et est remplacé par l’alkool qui caractérise essentiellement le vin.

Nous dirons, par la suite, de quelle manière on peut concevoir ce phénomène, ou cette suite intéressante de décompositions et de productions. Il ne nous appartient dans ce moment que d’indiquer les principaux faits qui accompagnent la formation de l’alkool.

Comme le but, et l’effet de la fermentation spiritueuse, se réduisent à produire de l’alkool, en décomposant le principe sucré, il s’en suit que la formation de l’un est toujours en proportion de la destruction de l’autre, et que l’alkool sera d’autant plus abondant que le principe sucré l’aura été lui-même ; c’est pour cela qu’on augmente à volonté la quantité d’alkool, en ajoutant du sucre au moût qui paroît en manquer.

Il suit toujours de ces mêmes principes, que la nature de la vendange en fermentation se modifie et change à chaque instant : l’odeur, le goût, et tous les autres caractères varient d’un moment à l’autre. Mais, comme il y a dans le travail de la fermentation une marche très-constante, on peut suivre tous ces changemens, et les présenter comme des signes invariables des divers états par lesquels passe la vendange.

1°. Le moût a une odeur douceâtre qui lui est particulière ; 2°. la saveur en est plus ou moins sucrée ; 3°. Il est épais et sa consistance varie, selon que le raisin est plus ou moins mûr, plus ou moins sucré. J’en ai éprouvé qui a marqué 75 degrés à l’aréomètre, et j’en ai vu d’autre qui ne donnoit que 40 à 42. Il est très-soluble dans l’eau.

À peine la fermentation est elle décidée, que tous les caractères