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changent ; l’odeur commence à devenir piquante par le dégagement de l’acide carbonique ; la saveur encore très douce est néanmoins déjà mêlée d’un peu de piquant ; la consistance diminue ; la liqueur qui, jusques-là n’avoit présenté qu’un tout uniforme, laisse paroître des flocons qui deviennent de plus en plus insolubles.

Peu à peu la saveur sucrée s’affoiblit et la vineuse se fortifie ; la liqueur diminue sensiblement de consistance ; les flocons détachés de la masse sont plus complettement isolés. L’odeur d’alkool se fait sentir même à une assez grande distance.

Enfin arrive un moment où le principe sucré n’est plus sensible ; la saveur et l’odeur n’indiquent plus que de l’alkool ; cependant tout le principe sucré n’est pas détruit ; il en reste encore une portion dont l’existence n’est que masquée par celle de l’alkool qui prédomine, comme il conste par les expériences très-rigoureuses de Gentil. La décomposition ultérieure de cette substance se fait à l’aide de la fermentation tranquille qui se continue dans les tonneaux.

Lorsque la fermentation a parcouru et terminé toutes ses périodes, il n’existe plus de sucre ; la liqueur a acquis de la fluidité, et ne présente que de l’alkool mêlé avec un peu d’extrait et le principe colorant.

4°. Coloration de la liqueur vineuse.

Le moût qui découle du raisin qu’on transporte de la vigne à la cuve avant qu’on l’ait foulé, fermente seul, donne le vin vierge, le protopon des anciens qui n’est pas coloré.

Les raisins rouges, dont on exprime le suc par le simple foulage, fournissent du vin blanc toutes les fois qu’on ne fait pas fermenter sur le marc.

Le vin se colore d’autant plus que la vendange reste plus long-tems en fermentation.

Le vin est d’autant moins coloré que le soulage a été moins fort, et qu’on s’est abstenu avec plus de soin de faire fermenter sur le marc.

Le vin est d’autant plus coloré que le raisin est plus mûr et moins aqueux.

La liqueur que fournit le marc qu’on soumet au pressoir est plus colorée.

Les vins méridionaux, et, en général, ceux qu’on récolte dans les lieux bien exposés au midi, sont plus colorés que les vins du Nord.

Tels sont les axiomes pratiques qu’une longue expérience a sanctionnés. Il en résulte deux vérités fondamentales : la première, c’est que le principe colorant du vin existe dans la pellicule du raisin ; la seconde, c’est que ce principe ne se détache et ne se dissout complettement dans la vendange, que lorsque l’alkool y est développé.

Nous nous occuperons en tems et lieu de la nature de ce principe colorant ; et nous ferons voir que, malgré qu’il se rapproche des résines par quelques propié-