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cellier, ayant soin de laisser un intervalle suffisant pour pouvoir commodément circuler, et s’assurer qu’aucun d’eux ne perde et ne transpire.

C’est dans les tonneaux ainsi préparés qu’on dépose la vendange, dès qu’on juge qu’elle a suffisamment cuvé : à cet effet, on ouvre la cannelle de la cuve qui est placée à quelques pouces au dessus du sol, et on fait couler le vin dans un réservoir pratiqué ordinairement par-dessous, ou dans un vaisseau qu’on y adapte à dessein de le recevoir ; le vin est de suite puisé dans le premier réservoir, et porté dans le tonneau où on l’introduit à l’aide d’un entonnoir.

La liqueur qui surnage le dépôt de la cuve, se nomme surmoût en Bourgogne. On soutire le surmoût avec soin, on le met dans des tonneaux de cent vingt pots, ou dans des demi-tonneaux de soixante. Ce surmoût donne le vin le plus léger, le plus délicat et le moins coloré.

Lorsqu’on a fait écouler tout le vin que peut fournir la cuve, il n’y reste que le chapeau qui s’est affaissé presque sur le dépôt. Ce marc est encore imprégné de vin, et en retient une quantité assez considérable qu’on en extrait en le soumettant au pressoir. Mais, comme le chapeau qui a été en contact avec l’air atmosphérique a assez constamment contracté un peu d’acidité, sur-tout lorsque la vendange a cuvé long-temps ; on a grand soin d’enlever et de séparer le chapeau pour l’exprimer séparément, ce qui donne un vinaigre de très bonne qualité.

On se borne donc à porter le dépôt de la cuve sous le pressoir, et on met le vin qui en découle avec celui qui est déjà dans les tonneaux ; après quoi on ouvre le pressoir, et, avec une pelle tranchante, on coupe le marc à trois ou quatre doigts d’épaisseur tout autour ; on jette au milieu ce qui est coupé, et on presse derechef ; on coupe encore, et on pressure pour la troisième fois.

Le vin qui provient de la première taille ou coupe est le plus fort, celui qui provient de la troisième est le plus dur, le plus âpre, le plus vert, le plus coloré.

Quelquefois on se borne à une première taille, sur-tout lorsqu’on veut employer le marc à la fermentation acéteuse ; souvent on mêle le produit de ces diverses coupes dans des tonneaux séparés pour avoir un vin coloré et assez durable ; ailleurs, on le mêle avec le vin non pressuré, lorsqu’on désire de donner à celui-ci de la couleur, de la force et une légère striction.

En Champagne, on mêle le vin de l’abaissement qui est celui du premier pressurage, avec ceux qui proviennent des tailles suivantes.

Le vin de presse est d’autant moins coloré, qu’on a pressé plus foiblement, plus promptement. On nomme ces vins-là en Champagne vins gris. On appelle œil de perdrix le vin qui provient de la première et de la seconde taille, et on donne le nom de vin de taille au produit de la troisième et quatrième : celui-ci est plus coloré,