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C’est toujours le goût, l’œil et l’odorat qu’il faut consulter. C’est la nature très-variable des substances qu’on doit employer, qu’il faut étudier ; et il nous suffira d’observer que dans toute cette partie de la science de multiplier les vins, tout se réduit 1°. À adoucir et sucrer les vins par l’addition du moût cuit et rapproché, du miel, du sucre, ou d’un autre vin, très liquoreux ; 2°. À colorer le vin par l’infusion des pains de tournesol, le suc des baies de sureau, le bois de campèche, le mélange d’un vin noir et généralement grossier ; 3°. À parfumer le vin par le sirop de framboise, l’infusion des fleurs de la vigne qu’on suspend dans le tonneau enfermées dans un nouet, ainsi que cela se pratique en Égypte, d’après le rapport d’Asselquist.

On fabrique encore dans l’Orléanois et ailleurs des vins qu’on appelle vins râpés, et qu’on fait ou avec des raisins égrappés qu’on foule avec du vin ; ou en chargeant le pressoir d’un lit de sarmens et d’un lit de raisins alternativement ou en faisant infuser des sarmens dans le vin. On les laisse fortement bouillir et on se sert de ces vins pour donner de la force et de la couleur aux petits vins décolorés des pays froids et humides.

Quoique les vins puissent travailler en tout temps, il est néanmoins des époques dans l’année auxquelles la fermentation paroît se renouveler d’une manière spéciale, et c’est sur-tout lorsque la vigne commence à pousser, lors qu’elle est en fleur, et lorsque le raisin se colore. C’est dans ces momens critiques qu’il faut surveiller les vins d’une manière particulière, et l’on pourra prévenir tout mouvement de fermentation en les soutirant et les souffrant ainsi que nous l’avons indiqué.

1 Lorsque les vins sont complètement clarifiés, on les conserve dans des tonneaux ou dans du verre. Les vases les plus amples et les mieux fermés sont les meilleurs. Tout le monde a entendu parler de l’énorme capacité des foudres d’Heidelberg dans lesquels le vin se conserve des siècles entiers sans cesser de s’améliorer ; et il est reconnu que le vin se fait mieux dans les futailles très-volumineuses que dans les petites.

Le choix du local dans lequel les vases contenant les vins doivent être déposés, n’est pas indifférent : nous trouvons, à ce sujet, chez les anciens, des usages et des préceptes qui s’écartent pour la plupart de nos méthodes ordinaires, mais dont quelques-uns méritent notre attention. Les Romains soutiroient le vin des tonneaux pour l’enfermer dans de grands vases de terre vernissés en dedans ; c’est ce qu’ils appelloient diffusio vinorum. Il paroît qu’ils avoient deux sortes de vaisseaux pour contenir les vins, qu’ils appelloient amphore et code. L’amphore, de forme carrée ou cubique, avoit deux anses et contenoit quatre-vingt pintes de liqueur. Ce vaisseau se terminoit par un col étroit qu’on bouchoit avec de la poix et du plâtre pour empêcher le vin de s’éventer. C’est