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tats des expériences comparées qui ont été faites.

J’ai dirigé moi-même plusieurs établissemens du même genre, et d’après ces mêmes principes. Je crois qu’il est difficile de porter plus loin la perfection, et il est à désirer que ces méthodes de distillation deviennent générales.

Mais c’est encore moins à la forme de l’appareil qu’à la construction du foyer et à la sage conduite du feu qu’on doit ces effets extraordinaires. Le bord postérieur de la grille doit répondre au milieu du fond de la chaudière, pour que la flamme qui fuit frappe et chauffe également tout le cul. La distance de la chaudière à la grille doit être d’environ seize à dix-huit pouces, lorsqu’on chauffe avec le charbon de terre, et la cheminée doit être tournante.

Indépendamment de l’économie dans le temps, le combustible, la main-d’œuvre, etc., cette forme d’appareil influe sur la qualité des eaux-de-vie. Elles sont infiniment plus douces que les autres ; elles n’ont point le goût d’empyreume qui est presque un vice inséparable des eaux-de-vie du commerce ; cette dernière qualité qui les rend si supérieures aux autres, a failli devenir pour elles un motif d’exclusion, parce que les habitans du nord, qui en font leur principale boisson, les trouvoient trop douces. Il a donc fallu les mêler avec de l’eau-de-vie brûlée pour les accréditer. On peut aisément leur donner ce goût de feu, en soutenant et prolongeant la distillation au-delà du terme. La liqueur qui passe vers la fin sent très-décidément le brûlé.

Il est nécessaire, dans les arts, de se plier au goût, même au caprice du consommateur ; et ce qui, chez nous, est rejeté comme de mauvais goût, peut paroître exquis et friand à l’habitant du nord : dans le midi, une sensibilité extrême repousse des boissons brûlantes qui, dans des climats très-froids, pourront être foibles ; il faut écorcher un moscovite pour lui donner de la sensibilité, a dit très-ingénieusement MontesQuieu.

D’après des expériences comparatives, que j’ai été dans le cas de faire, je me suis convaincu qu’on obtenoit encore un peu plus d’eau-de-vie par ce procédé que par l’ancien. Ce qui provient de ce que l’eau-de-vie sort fraîche de l’appareil, et qu’elle n’éprouve aucune perte par l’évaporation. Aussi les ateliers, dans lesquels ces appareils perfectionnés sont établis, n’ont-ils pas sensiblement l’odeur de l’eau-de-vie.

Lorsqu’on distille des vins, on conduit la distillation jusqu’au moment où la liqueur qui passe n’est plus inflammable.

Les vins fournissent plus ou moins d’eau-de-vie, selon leur degré de supériorité. Un vin très généreux fournit jusqu’au tiers de son poids. Le terme moyen du produit de nos vins, dans le midi, est d’un quart de la totalité : il en est qui fournissent jusqu’à un tiers.

Les vins vieux donnent une meilleure eau-de-vie que les nouveaux ; mais ils en fournissent