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moins, sur-tout lorsque la décomposition du corps sucré a été terminée avant la distillation.

Ce qui reste dans la chaudière, après qu’on en a extrait l’eau-de-vie, est appelle vinasse : c’est le mélange confus du tartre, du principe colorant, de la lie, etc. On rejette ce résidu comme inutile ; néanmoins, en le faisant dessécher à l’air ou dans des étuves, on peut en extraire par la combustion un alkali assez pur.

Il y a des ateliers où l’on fait aigrir la vinasse pour la distiller et en extraire le peu de vinaigre qui s’y est formé.

L’eau-de-vie est d’autant plus spiritueuse qu’elle est mélangée avec une moins grande quantité d’eau ; et, comme il importe au commerce de pouvoir en connoître aisément les degrés de spiritualité, on s’est long-tems occupé des moyens de les constater.

Le bouilleur ou distillateur juge de la spiritualité de l’eau-de-vie par le nombre, la grosseur et la permanence des bulles qui se forment en agitant la liqueur : à cet effet, on la verse d’un vase dans un autre ; on la laisse tomber d’une certaine hauteur ; ou bien, ce qui est plus généralement usité, on l’enferme dans un flacon allongé qu’on en remplit aux deux tiers, et on l’agite fortement en en tenant l’orifice bouché avec le pouce ; ce dernier appareil est appelle la sonde.

L’épreuve par la combustion, de quelle manière qu’on la pratique, est très-vicieuse. Le règlement de 1729 prescrit de mettre de la poudre dans une cuiller, de la couvrir de liqueur et d’y mettre le feu : l’eau de-vie est réputée de première qualité si elle enflamme la poudre ; elle est mauvaise dans le cas contraire. Mais la même qualité de liqueur enflamme ou n’enflamme pas, suivant la proportion dans laquelle on l’emploie ; une petite quantité enflamme toujours, une grande n’enflamme jamais, parce que l’eau que laisse la liqueur suffit alors pour humecter la poudre, et la garantir de l’inflammation.

On a encore recours au sel de tartre (carbonate de potasse), pour éprouver l’eau-de-vie. Cet alkali se dissout dans l’eau et nullement dans l’alkool : de manière que celui-ci surnage la dissolution qui s’en fait.

Ces premiers procédés, plus ou moins défectueux, ont fait recourir à des moyens capables de déterminer la spirituosité par l’évaluation de la gravité spécifique.

Une goutte d’huile versée sur l’alkool se fixe à la surface, ou se précipite au fond, selon le degré de spirituosité de la liqueur. Ce procédé a été proposé et adopté par le gouvernement espagnol, en 1770 ; il a fait l’objet d’un règlement, mais il est sujet à erreur, puisque l’effet dépend de la hauteur de la chute, de la pesanteur de l’huile, du volume de la goutte, de la température de l’atmosphère, des dimensions des vases, etc.

En 1772, cet objet important fut repris par deux physiciens habiles, Borie et Poujet de Cette ; ils ont fait connoître et adopter,