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grande partie de la matière sucrée ayant passé à l’état spiritueux, l’acidification doit s’en mieux faire.

Plusieurs auteurs pensent au contraire que les vins tournant à l’aigre sont ceux qu’ont doit préférer. Sans doute il faut bien en tirer parti quand ils sont dans cet état de détérioration ; mais il n’en résulte toujours qu’un vinaigre fort médiocre pour l’odeur, le goût et les effets : ils ont éprouvé un commencement d’altération dans leurs principes constituans : enfin, c’est une fermentation étrangère à celle du vinaigre.

Ceux qui partagent cette opinion et qui regardent les petits vins, les boissons vineuses connues sous le nom de piquette, comme les plus propres à faire le vinaigre, sont également dans l’erreur ; car il est prouvé que le vin le plus généreux est celui qui produit le plus de vinaigre de qualité supérieure ; que le petit cidre, la petite bierre et les autres liqueurs peu abondantes en esprit-de-vin (alkool), donnent constamment des vinaigres foibles et de peu de durée.

Cependant, quoique fesp rit-devin soit nécessaire à l’acidification, nous sommes éloignés de penser qu’il fasse une des parties constituantes du vinaigre, et que ce dernier soit composé des mêmes principes que le vin, On sait qu’en distillant le vin, la liqueur qui reste au fond de la cucurbite ne produit plus qu’un vinaigre plat, d’une garde difficile. Il est acide, mais dépourvu de ce gratter particulier qui le caractérise.

Si, lorsque le vinaigre est parfait on n’y retrouve plus l’eau-de-vie que le vin contenoit avant sa conversion en acide acéteux, ou qu’on y a ajouté dans la vue d’augmenter sa force, on se tromperoit en imaginant qu’il est si intimement combiné, qu’il paroit impossible de l’en dégager ; mais il a changé de nature dans l’acidification ; et l’on est bien convaincu maintenant que le fluide qu’on a pris pour de l’esprit-de-vin et qui s’enflamme en chauffant jusqu’à l’ébullition, le vinaigre radical, est le gaz inflammable, le gaz hydrogène.

D’après les expériences et les vues du citoyen Chaptal qui vient de développer dans cet ouvrage avec le génie qui lui est propre tous les phénomènes de la vinification, il sera plus aisé encore de juger pourquoi les vins du Midi, c’est-à-dire, les plus riches en esprit, produisent les meilleurs vinaigres, et comment en ajoutant de l’eau-de-vie (alkool) aux vins de bas aloi et aux autres liqueurs vineuses foibles ou passées, on parvient à obtenir un acide plus fort et d’une garde plus facile.

Mais nous en avons dit suffisamment pour montrer la différence des effets de la fermentation vineuse et de la fermentation acéteuse ; il convient d’exposer les méthodes d’après lesquelles on procède à la conversion du vin en vinaigre dans diverses contrées, en nous restreignant aux procédés les plus simples et les moins dispendieux ; afin que tout bon économe puisse facilement et à peu