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l’inutilité des décoctions des feuilles du chanvre.

Quelques personnes recommandent de faire bouillir du vert-de-gris dans du vinaigre, pour en asperger les terrains infestés d’achées ; cette liqueur les empoisonne dans leur galerie et en purge le terrain. Mais ce remède d’abord trop dispendieux pour être employé en grand, peut occasionner des accidens plus dangereux que le mal ; il est prudent de ne point s’en servir. On recommande encore de faire tremper les graines, avant de les semer, dans de l’eau où l’on a mis de la chaux tamisée. Cette espère de chaulage donne aux graines un goût qui subsiste longtemps et en écarte les vers. Ce moyen, très-bon pour détruire les germes de la carie des grains, ne doit produire que peu d’effet sur les achées, parce que ces animaux ne recherchent point les semences pour les manger ; ils ne vivent que de terre.

Enfin, un des moyens les plus sûrs de préserver les semis qui se font dans des terrines ou des pots du ravage des vers de terre est de n’employer que des vases de cette espèce, percés à leurs fonds de fentes étroites par lesquelles ils ne puissent s’introduire.

Usages. Les lombrics sont cités, dans quelques matières médicales, comme apéritifs, sudorifiques, diurétiques, lorsqu’on les a fait infuser dans du vin blanc ; comme propres à fortifier les nerfs et les jointures, lorsqu’ils ont été infusés dans huile d’olive ; comme très-efficaces contre les rhumatismes goutteux, et la fièvre tierce, lorsqu’ils sont réduits en poudre ; enfin, comme amenant les panaris à suppuration, lorsqu’ils sont appliqués en vie autour du doigt ; mais tous ces remèdes sont presque abandonnés aujourd’hui. Dans quelques contrées de l’Inde, les hommes mangent les vers de terre crus ou cuits, et assaisonnés de différentes manières. En Europe, on ne les emploie guères qu’à la pêche et à la nourriture de la jeune volaille.

Toutes les espèces sont également bonnes pour la pêche, mais il faut proportionner la grosseur des individus au genre de poisson qu’on désire se procurer. Les plus gros doivent être réservés pour les lignes dormantes que l’on tend pour prendre les carpes, les barbeaux, les anguilles, etc. Il faut toujours avoir soin de les attacher à l’hameçon de manière qu’ils restent en vie le plus long-temps possible ; car les mouvemens qu’ils se donnent pour se dégager influent beaucoup sur le succès de la pêche. Les pêcheurs ont plusieurs secrets pour rendre les vers de terre plus appétissans pour les poissons. Un d’eux est de les mettre quelques jours, avant que de les faire servir d’appâts, dans de la terre où l’on a mélangé du pain de chènevis, c’est-à-dire la matière qui reste après qu’on a exprimé l’huile des graines du chanvre. (Thouin.)

Ces trois dénominations d’Achées, Aiches ou Laiches, sont également appliquées par les pêcheurs aux vers de terre dont ils se servent comme un des meilleurs appâts. Ils emploient différens procédés pour se procurer de ces vers. C’est principalement dans les prés frais et les lieux ombragés que l’on doit les chercher ; on y enfonce un piquet auquel on fait décrire un cercle par le bout que l’on tient à la main ; ce mouvement fait sortir les vers. Le trépignement des pieds, les coups de batte dont on frappe la terre, l’arrosement avec de l’eau salée, avec une forte décoction de feuilles de noyer, ou avec du vinaigre dans lequel on a fait bouillir du vert-de-gris, produisent le même effet. On trouve aussi les vers sous les pots et les caisses des jardins, et en se promenant la nuit après une pluie