Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/186

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se bornoient à en bien cultiver dix, et mettoient le surplus de leur tournure en prairies artificielles ou en plantes légumineuses, ils pourroient récolter la même quantité de subsistances que sur les vingt arpens de leur assolement ordinaire, et une surabondance de fourrages qui, en leur permettant d’augmenter leurs bestiaux et les profils qu’ils en retirent, leur procureroient encore une augmentation d’engrais.

Si nous examinons ensuite la moyenne culture dans les cantons où la mauvaise qualité des terres, la sécheresse, ou la chaleur du climat, les rendent d’une culture ingrate, et où, pour pouvoir en tirer quelque parti, on est obligé de les complanter en châtaigniers, ou en noyers, ou en pommiers, ou en oliviers, nous la trouverons encore plus négligée.

Les terres y étant plus mauvaises, le métayer a plus d’intérêt à les laisser en friche, qu’à les bien cultiver : on ne trouve jamais de profits à cultiver des céréales sur une mauvaise terre.

Lors même que leur culture seroit bien soignée, les arbres complantés sur ces terres y nuiroient toujours plus ou moins à la végétation des grains, et même à celle des herbages, suivant les distances moindres ou plus grandes qu’on aura données à leur espacement ; et les minces récoltes que l’on fait sur ces terres ne permettent pas aux fermiers de nourrir des bestiaux en assez grand nombre pour pouvoir les amender convenablement.

Enfin, si ces localités présentent des terrains fertiles ; si elles sont placées dans le voisinage des côtes de la mer et des anses, dans lesquelles elle dépose beaucoup de vase, d’algues, de varech, qui offrent au cultivateur des engrais abondans et économiques ; et si elles réunissent encore à ces avantages celui d’une population nombreuse, comme dans beaucoup de nos départemens septentrionaux maritimes ; alors la moyenne culture française offre un tableau tout différent de celui que nous venons de décrire.

Ce n’est plus une routine aveugle, une ignorance crasse, que l’on remarque dans les cultivateurs de ces localités. Ils montrent au contraire une activité et une intelligence comparables à celles des bons fermiers des pays de grande culture. Aussi, les assolement de l’agriculture de la Flandres et ceux de la Normandie ont-ils mérité d’être cités comme de bons exemples, par nos meilleurs agronomes.

Nous devons cependant faire observer, sur ces assolemens, 1°. que la culture des céréales n’y entre que comme récoltes de rotation ; elle n’est pas, pour les cultivateurs de ces localités, aussi avantageuse que dans les pays de grande culture ; et c’est dans la culture des plantes huileuses, filamenteuses, ou colorantes, ou dans celle des herbacés, qu’ils trouvent les plus grands bénéfices.

2°. Que ces assolemens ne pourroient pas indifféremment être adoptés dans tous les pays de moyenne culture, et encore moins dans ceux de grande culture, parce que, pour en obtenir les mêmes avantages, il faudroit y transporter aussi les mêmes qualités de terre, la même facilité de se procurer des engrais, la même température de climat, et la même population disponible.

C’est cette grande population locale qui procure aux départemens de moyenne culture, dont nous venons de parler, des bras économiques avec lesquels ils peuvent cumuler, avec tant d’avantages, la culture des céréales avec celle des autres plantes.

Troisième Division. — Pays de