Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/261

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Les cochons trouvant découvertes les plantes à racines charnues, telles que les œnanthes, les pissenlits, les scorsonères, les tragopogons et autres de cette espèce, plus nuisibles qu’utiles, ils les arrachent et en font leur pâture. Quelquefois des poules s’écartant des métairies voisines, viennent paître dans la prairie, et y ramassent les graines tombées, les larves d’insectes, et les vers. Ainsi, il n’y a rien de perdu, tout est mis à profit, sans qu’il en résulte aucune rixe parmi des animaux d’espèces si différentes ; ils vivent tous sans concurrence pour les alimens, puisque ce que les uns délaissent et ne peuvent manger, est préféré par les autres. Les cigognes purgent le pays des reptiles qui s’y trouvent.

Quand l’herbe de la pièce de prairie est épuisée par les animaux qui ont vécu dessus, on les fait passer dans une autre pièce ; en la quittant, il semble qu’elle ait été tondue par les plus habiles faucheurs. Il ne s’y rencontre que quelques trous faits par les porcs, pour tirer les racines des plantes nuisibles, dont ils ont purgé la prairie ; on les bouche avec la bêche, et l’herbage qui repousse bientôt invite les animaux à s’en repaître.

Il est plusieurs grands arbres qui affectent de croître dans les terrains imbibés par les eaux, telles sont diverses espèces de saules, de peupliers, de frênes et d’aulnes, parmi nos arbres indigènes ; on remarque, parmi les arbres étrangers le platane d’Occident, l’érable à feuilles de frêne, le tulipier de Virginie, le tupelo ou nissa aquatica L.

Les oseraies viennent beaucoup mieux dans les terrains arrosés par infiltration, que dans ceux qui le sont par irrigation ou par submersion. Dans les jardins paysagistes, où l’on fait cas de la culture des arbres étrangers de nature aquatique, on établit artificiellement des marais propres à leur conservation. Ces marais artificiels sont de grands bassins de différentes formes, suivant le goût du propriétaire ; on établit au milieu des îlots ; ils sont entourés de planches de bois de chêne, lesquelles sont percées d’un grand nombre de trous. On remplit ces espèces de caisses d’une terre préparée convenablement à la nature des arbres qu’elles doivent contenir, et on y fait entrer les eaux. Il existoit dans le jardin botanique de Trianon, près Versailles, un bassin de cette espèce, dans lequel nous avons vu en pleine vigueur, et fleurissant, un grand nombre d’arbres et d’arbustes étrangers, et des plantes précieuses, tels que le dirca palustris, le myrica cerifera, l’hypericum kalmianum L. ; beaucoup de vaccinium américains, de rhododendrons, de kalmia ; et, parmi les plantes, les sarracenia, la Dionœa muscipula, les cypripedium, etc.

Dans les jardins botaniques, on arrose par infiltration les planches baugées et remplies de terreau de bruyères, le moyen qu’on emploie est très-simple. On établit dans la longueur de la planche, vers son milieu, à la profondeur de dix-huit à vingt pouces, un tuyau de terre ou de grès, percé dans sa longueur de beaucoup de trous ; il est fermé par un de ses bouts et forme un coude par l’autre, lequel vient aboutir hors de terre, à un baquet dans lequel on verse de l’eau destinée à imbiber le sol de la planche, toutes les fois qu’il en est besoin. Cette sorte d’arrosement humecte la terre sans la laver, et entraîne au fond de la planche les engrais utiles à la végétation des plantes qu’elle nourrit.

Ou arrose encore par infiltration beaucoup de plantes délicates et sur-tout des semis à graines très-fines, qui se font ou se cultivent dans des pots. Au lieu de les arroser à la manière ordinaire, avec l’arrosoir à pomme, on se contente d’enfoncer le fond de leurs vases dans une terrine ou un baquet qu’on entretient plein d’eau. Par ce moyen, la plante ne pompe que l’humidité qui lui est con-