Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/301

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jaunâtre au milieu, et du rougeâtre sur le reste. Dix-huit rayons, dont les premiers sont très-longs soutiennent chaque nageoire pectorale ; elles sont teintes d’un mélange de rouge et de jaune ; la première de ces couleurs domine à la partie supérieure ; quelques taches arrondies et noirâtres se font remarquer en dedans et à la base. Il n’existe que neuf rayons aux nageoires du ventre ; elles sont arrondies en ovale, plus rouges que celles de la poitrine, et tachetées en dessus.

Quelque ternes que soient les couleurs des nageoires du barbeau, celles qui le couvrent lui-même ont encore moins de vivacité. Il a le dos et le dessus de la tête olivâtres ; les côtés bleuâtres au dessus de la ligne latérale, et blanchâtres au dessous ; le ventre et la gorge blancs ; les côtés de la tête mêlés d’olivâtre et de jaune, avec des points cendrés ; la lèvre supérieure rouge ; enfin, la prunelle de l’œil noire, et l’iris d’un brun clair.

Afin de ne point omettre de traits un peu saillans de la description du barbeau, j’ajouterai que ses parties intérieures ressemblent beaucoup à celles de la carpe, et que les pièces principales de son squelette consistent en quarante-six vertèbres à l’épine dorsale, et en dix-sept côtes de chaque côté.

Ces détails de description paroîtront peut-être déplacés, aux yeux de quelques personnes, dans un livre dont le principal objet n’est pas l’histoire naturelle. Ils ne sont pas néanmoins sans intérêt, même pour la simple curiosité. Je sais d’ailleurs, par expérience, que l’homme doué d’un assez bon esprit pour préférer le calme et la douceur d’une vie champêtre à l’existence agitée et tumultueuse des cités, le paisible domaine de la nature au théâtre bruyant de l’ambition et de l’intrigue, et une bibliothèque peu nombreuse, mais choisie, à la futilité des conversations, dont les sons confus et insignifians se font entendre, sans intérêt comme sans plaisir, dans les cercles où l’ennui siège à côté du luxe ; je sais, dis-je, que ce tranquille possesseur d’une habitation champêtre se plaît souvent à comparer l’animal ou la plante qui lui tombe sous la main, avec ce que ses livres en rapportent ; à rectifier les inexactitudes échappées à l’écrivain, ou à suppléer aux omissions, quelquefois même à communiquer des observations profitables à la science. Dans ces instans de loisir, passés ainsi d’une manière également agréable et utile, les descriptions un peu étendues ne lui semblent point trop longues, sur-tout lorsqu’elles sont écrites en style intelligible, et qu’un néologisme barbare ne les a point surchargées d’expressions tellement inusitées et étrangères à notre langue, qu’il n’est presque point de Français en état de les comprendre… Mais revenons au poisson qui fait le sujet de cet article.

Les eaux claires et rapides sont celles qui plaisent le plus aux barbeaux : ce n’est pas qu’ils ne réussissent très-bien dans les étangs ; mais leur chair y devient molle et insipide. Ils aiment à se cacher parmi les grosses pierres, et sous les rives avancées et les rochers saillans. Ils se rassemblent quelquefois en troupes dans ces sortes d’asiles d’où il est très difficile de les faire sortir. Leur nourriture est très-variée, et par conséquent très-facile. Ils mangent avec une égale avidité les plantes aquatiques, et même les plantes terrestres qui croissent sur les bords ombragés des eaux courantes, particulièrement la grande chélidoine, les limaçons, les vers, les coquillages, les insectes, les petits poissons, et même les cadavres des hommes et des animaux. M. Bloch, de Berlin, à qui l’on doit une magnifique histoire des poissons, rapporte qu’en 1683, après le siège de Vienne, on trouva une