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Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/422

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sur une question aussi importante pour la santé des hommes ; car, les causes de cette générosité des champignons étant connues, on parviendroit peut-être à les en débarrasser.

De toutes les espèces de champignons, une seule est cultivée, c’est l’Agaricus esculentus de Linnée ; il croît sur des couches, auxquelles on donne aussi le nom de meules ; elles se construisent d’une manière différente de celle des couches de jardins.

On leur donne ordinairement deux pieds de large par le bas, vingt pouces de haut dans le milieu, et on les arrondit en dos de bahut ; leur longueur est indéfinie. Le fumier que l’on emploie à les construire est un fumier court, mélangé de crottin de cheval et de vieux fumier retiré des couches de l’année précédente. Avant de l’employer, on l’étend sur la surface du terrain où doivent être les meules, et on en forme un lit d’environ un pied d’épaisseur ; on le remue de temps en temps avec la fourche, après l’avoir arrose quelques jours auparavant, pour hâter sa fermentation et sa décomposition. Lorsqu’il est arrivé au point de moiteur convenable, que toutes ses parties sont à peu près également échauffées, et qu’enfin son grand feu est passé, on s’occupe à construire les meules. D’abord on trace sur le terrain l’espace qu’elles doivent occuper ; ensuite on établit un lit de fumier d’environ huit pouces d’épaisseur, bien purgé de toutes matières étrangères, et bien secoué, pour qu’il ne contienne aucune pelote, aucun durillon. Sur ce premier lit, on en établit un second de la même manière, et sur celui-ci un troisième qui termine la couche. Il faut seulement avoir soin de bien tasser le fumier avec le dos de la fourche, à mesure qu’on le pose, afin que toute la couche forme une masse solide et parfaitement liée. On voit ici qu’il n’est pas question de faire des bourrelets de fumier pour border ces couches, comme on fait pour les autres ; les bords de celles-ci étant très-arrondis, se soutiennent assez d’eux-mêmes.

Lorsqu’une meule est faite, on la peigne légèrement avec les dents de la fourche, tant pour en extraire le fumier qui se trouveroit de trop, que pour unir la circonférence de la couche, et lui donner une forme régulière dans toute sa longueur. On place ensuite, de distance en distance, des piquets qui traversent la couche perpendiculairement dans sa plus grande épaisseur, afin de pouvoir s’assurer de temps en temps de son degré de chaleur ; et, lorsqu’elle ne conserve plus qu’une chaleur d’environ dix-huit degrés, on peut y mettre, sans inconvénient, le blanc de champignon ou les filamens qui doivent donner naissance aux champignons : c’est ce qu’on appelle larder la couche de blanc. Cette opération consiste à distribuer sur toute la surface de la meule, à un pouce et demi de profondeur, et à six ou huit pouces de distance les unes des autres, de petites mottes de vieux fumier rempli de blanc de champignon, en soulevant le fumier de la couche d’une main, tandis que de l’autre on y place la motte de vieux fumier. On la recouvre ensuite, et l’on raffermit la meule en la battant légèrement. Quelques jours après, on visite le blanc de champignon, pour s’assurer s’il n’a pas été brûlé par la chaleur de la couche, et voir s’il commence à passer, des mottes où il étoit contenu, dans le fumier qui les environne. Dès qu’on s’appercoit qu’il s’allonge et fait des progrès, on prépare un mélange composé de parties à peu près égales de terre de potager et de terreau de couche bien tamisé et délayé en consistance de mortier un peu épais. On applique ce mortier avec une pelle sur la surface de la meule, et on l’en revêtit d’environ deux pouces d’épaisseur. Cette opération s’appelle gopter, gobeter, ou