Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 11.djvu/531

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nestes de cette corruption ; elle a été poussée à un tel point, que ceux de ces grands propriétaires qui, par leurs mœurs, leur humanité et leurs connoissances, commandoient l’amour et la vénération de ceux qui dépendoient d’eux, n’ont pas échappé à la proscription générale, pendant l’anarchie qui a pesé trop long-temps sur la France,

Aujourd’hui que les fortunes foncières sont les plus sûres et les plus recherchées, que le nouvel ordre de choses permet aux riches propriétaires de passer plus de temps à la campagne, et leur en fait souvent un devoir, à cause de l’ordre et de l’économie qu’un propriétaire sage et simplement foncier doit admettre dans ses dépenses et dans l’administration de ses biens, ils n’auront plus de répugnance à habiter la campagne, au moins pendant la belle saison, et à s’y faire des occupations utiles et agréables.

Parmi toutes ces occupations, c’est celle de l’agriculture qui offre le plus de jouissances réelles à un propriétaire sage et intelligent.

Nous ne conseillerons cependant pas aux propriétaires de se mettre à la tête d’une grande exploitation rurale, ou, pour nous servir de l’expression usitée, de faire valoir par eux-mêmes, s’ils n’ont point été élevés, dans la profession de cultivateur.

Au laboureur la charrue, dit le proverbe : et si celui qui est fils de maître a besoin de toutes ses facultés morales et physiques pour bien conduire une grande exploitation, pour en prévoir tous les travaux, pour les ordonner a temps, pour en surveiller la bonne exécution, pour bien choisir les bestiaux nécessaires à son exploitation, pour ne pas les payer plus qu’ils ne valent, pour acheter et vendre dans les momens les plus avantageux, etc., on sent combien un propriétaire qui ne seroit point accoutumé à une vie aussi active, et qui ne réuniroit point toutes les connoissances diverses qui constituent un fermier intelligent, ou qui, pour suppléer à l’activité et aux connoissances qui lui manquent, seroit obligé de s’en rapporter à un gérant, aura de désavantage sur le fermier dans son exploitation.

À ce sujet, nous avons consulté beaucoup de propriétaires qui ont fait valoir ; nous avons fait valoir nous-mêmes, et nous nous sommes convaincus que, si l’on excepte quelques localités ou quelques circonstances favorables, un propriétaire aisé trouvera, dans le produit net de son exploitation, une rente moindre que celle qu’il en auroit retirée sans avances et sans peines, en la louant à un fermier intelligent ; et que la perte qu’il éprouvera annuellement sera d’autant plus grande, que son exploitation sera plus étendue.

Mais, comme un propriétaire aisé a toujours besoin de chevaux à la campagne, et d’une petite basse-cour ; qu’il lui est important de donner des exemples de bonne culture à ses fermiers ; qu’il faut d’ailleurs pourvoir à la nourriture de ses bestiaux, sans ôter à la culture aucuns moyens d’engrais ; enfin, que le propriétaire a besoin de fumiers pour ses jardins, nous lui conseillons une petite exploitation. D’un autre côté, le propriétaire aura souvent, dans une terre étendue, des propriétés d’une autre nature que celle des terres cultivables, comme des prés, des bois, des plantations, etc. ; et, si la culture de ses terres présente aux autres cultivateurs une culture mieux entendue et des récoltes plus abondantes que les leurs, il pourra encore leur offrir des exemples utiles dans l’amélioration de ses prairies, dans la conservation et l’aménagement de ses bois, et dans le soin de ses plantations.

Ce n’est point d’ailleurs par l’intermédiaire d’un gérant qu’un propriétaire aisé peut améliorer ses propriétés : en