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les dessèchemens qui portent leurs eaux à l’Océan, pour arrêter l’action du flux qui feroit refouler les eaux ; elle sert encore dans tous les lacs, étangs, rivières où l’on peut craindre des crues d’eaux.

J’ai donc pensé qu’il étoit nécessaire de faire connoître les vices que j’ai constamment remarqués dans ces sortes de constructions.

Mais, avant tout, il faut les décrire. Elles consistent ordinairement en deux culées ou bajoyers, qui soutiennent des portes-battantes qui sont busquées du côté où elles doivent soutenir les eaux. Quelquefois les culées soutiennent quatre portes ou vanneaux, deux busquées, deux autres contre-busquées.

Presque toujours, près des premières culées, on en construit de secondes dans l’épaisseur desquelles on pratique une coulisse ou rainure dans laquelle une vanne monte et descend, conduite par une vis qui marche par le moyen d’un écrou fixé ; c’est ce qu’on appelle ordinairement porte-coulisse ou vanne. Telles sont les constructions les plus usitées ; voici leur usage :

Il faut se rappeler que, s’il importe de vider les eaux surabondantes, il n’importe pas moins de les retenir à volonté, pour l’irrigation des terres et abreuver les bestiaux.

Or les portes-battantes que l’Océan fait fermer d’elles-mêmes, au moment du flux, qui s’ouvrent à la mer descendante, parce que les eaux intérieures pèsent sur les vantaux ; ces portes, dis-je, s’ouvrent ou se ferment entièrement.

À la vérité, il est d’usage de construire de secondes portes-coulisses ou vannes dont nous avons parlé.

Il paroîtroit d’abord facile, à l’aide de cette machine, de modérer l’action des eaux ; mais cette opération est dangereuse, parce qu’alors la vanne ou porte coulisse soutient une masse d’eau énorme, celle de la hauteur de tout le canal ; qu’elle peut alors se rompre ou au moins se voiler ; et alors la vanne ne peut plus jouer dans les coulisses du bajoyer. Pour éviter ces inconvéniens, il est prudent, lorsque l’on bâtit les culées ou bajoyers, de leur donner assez de force pour y construire, dans l’épaisseur des piles, des canons creux que l’on ferme avec une simple vanne. Alors on peut ouvrir une seule de ces vannes, les deux en même temps, enfin les deux vannes et la porte principale, ce qui procure une plus grande chasse d’eau.

Bâtardeaux, aboteaux. Dans plusieurs dessèchemens, on est d’usage de construire, dans les canaux généraux, des batardeaux en terre, que les gens du pays appellent aboteaux, pour retenues eaux à différentes hauteurs. Ces aboteaux se font en terre glaise ou argile, que l’on soutient par des pieux, des madriers, des traverses.

Cet usage a les plus graves inconvéniens, et les voici :

1°. Il faut enlever ces batardeaux en entier, lorsque les eaux sont trop hautes, et souvent cela arrive momentanément après un orage. Trois jours après, il faudroit les reconstruire pour retenir les eaux ; et cela peut se renouveler plus d’une fois dans l’année.

2°. Ces batardeaux en terre, lorsqu’on les enlève, laissent toujours des barres ou dépôts, et, de là, des attérissemens, des envasemens dans les canaux.

3°. Enfin, dans les crues d’eaux rapides, on n’a pas le temps de retirer les batardeaux, et tout est inondé.

On prévient tous ces inconvéniens par la construction facile et peu dispendieuse des écluses à poutrelles.

Écluses à poutrelles. (Voyez Planche XXIV.)

Sur les bords du canal on construit deux piles ou culées ; elles portent chacune une coulisse assez profonde. Au fond du ca-