Page:Rozier - Cours d’agriculture, 1805, tome 12.djvu/132

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qu’une petite quantité de graines, comme l’apocyn à la ouate, l’asclepias Syriaca, le topinambour, les pervenches d’Europe, et peut-être même le chiendent, lequel, comparativement aux autres graminées, paroît produire des épis bien moins fournis.

Ces germes, à l’instar des semences, peuvent être mis en terre, former des plantes complètes, capables de donner à leur tour des boutons, des drageons, des cayeux doués de la même propriété générative. Mais comme ils sont moins vigoureux que ceux qui existent dans les graines, que les individus auxquels ils donnent naissance ont la fibre plus molle, plus lâche, qu’ils sont moins rustiques, moins durables, plus susceptibles de se détériorer, et que même ils deviennent stériles, après une suite plus ou moins longue de générations, la nature n’a que très-rarement recours, pour renouveler les végétaux, à ces germes reproducteurs secondaires, et le cultivateur ne les emploie que dans des cas particuliers. Ce n’est, pour ainsi dire, que dans l’enceinte de son jardin qu’il s’en permet l’usage. Veut-il, par exemple, conserver une variété qui lui plaît ? il la greffe sur un autre arbre ; veut-il hâter ses jouissances, qui seroient retardées par des semis ? il couche les branches de ses vignes, il plante la bouture d’un arbre, il divise ses racines, il en détache les rejetons. Mais a-t-il à repeupler des forêts ou des prairies ? il préfère la voie des semis ; et, pour obtenir des arbres plus robustes et des herbes plus vigoureuses, il choisit pour semences celles qui sont produites par des arbres ou des plantes jouissant de la plus grande énergie.

C’est par des semis faits dans un sol préparé par des labours et fécondé par des engrais, que les hommes sont parvenus à couvrir la terre de plantes céréales et légumineuses, devenues par leurs soins plus alimentaires qu’elles ne l’étoient dans l’état sauvage.

C’est par ce même mode de reproduction et de culture, qu’ils ont pu faire croître, jusque dans les pays du Nord, une infinité de plantes précieuses, originaires des contrées les plus chaudes ; mais la culture par laquelle ils ont perfectionné les végétaux utiles, a donné naissance à un grand nombre de variétés, qui toutes diffèrent, plus ou moins, des espèces qui les ont produites, et tendent continuellement ou à s’en rapprocher, ou à s’écarter de leur état actuel, et à subir de nouvelles variations, de manière qu’elles ne peuvent se maintenir dans l’état de perfectionnement où nous les avons amenées, que par des travaux soutenus. Or, c’est particulièrement vers la production de leurs semences que nous devons diriger tous nos soins, puisqu’il est bien démontré que c’est principalement par elles que nous conservons, que nous multiplions ces variétés, que nous empêchons qu’elles ne soient des jeux éphémères de la nature.

Les semences influent tellement sur la nature des productions, que souvent celles-ci éprouvent des changemens successifs dans la qualité et dans la forme ; au point que, malgré la richesse du sol, l’abondance des engrais, les faveurs de la saison et l’industrie active des cultivateurs, si ces semences pèchent par leurs caractères spécifiques, si elles ne résultent pas de plantes franches dans leurs espèces, surveillées dans leur culture et dans leur conservation, il ne faut pas espérer d’obtenir de ce concours de circonstances heureuses tous les avantages qu’on auroit droit d’en attendre.

Indépendamment des fonctions que les graines ont à remplir dans l’économie végétale, elles favorisent le transport et la propagation des plantes, d’une extrémité du monde à l’autre ; c’est par leur