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ordinaire ; tous les symptômes ont diminué, et les animaux ont été guéris en quinze jours, sans qu’on les ait changés d’écurie.

Si la morve étoit contagieuse, comme on l’a dit ; si elle se communiquoit par les ustensiles d’écurie et par les harnois, comme on l’a cru, on ne pourroit plus voyager avec des chevaux à soi, et sans courir les risques de les rendre morveux. Pourroit-on citer une auberge où n’aient pas logé des chevaux morveux ? Quand plusieurs chevaux sont attaqués ensemble ou successivement, c’est qu’ils ont participé à des causes communes. Quand un cheval sain, mis à côté d’un cheval morveux, devient affecté de la morve, c’est qu’il l’auroit eue sans cette cohabitation.

Or, les dispositions qui la produisent spontanément sont, la foiblesse, l’épuisement, un genre de relâchement de tout le système, venant d’alimens privés de sucs, de logemens insalubres, etc. Quand ces dispositions existent, les circonstances dans lesquelles la maladie se déclare sont le passage du chaud au froid, un travail forcé, etc.

Les mauvais alimens causent de mauvaises digestions, et débilitent l’estomac ; de la foiblesse de ce viscère résulte une infinité de maux, tels que des tranchées, des affections vermineuses, des engorgemens lymphatiques, le farcin, la gale, etc.

Les écuries insalubres causent les plus grands désordres dans l’économie animale. Les plus dangereuses sont celles qui sont humides, où l’urine séjourne, dans lesquelles l’air extérieur ne circule pas ; qui sont mal exposées, trop froides ou trop chaudes ; qui sont sous terre, ou adossées contre des terres élevées, imprégnées d’eaux fétides et décomposées.

L’eau des puits creusés dans des terres remuées, qui vient des égouts et des latrines, est dans le cas de produire les mêmes effets, et d’occasionner d’autres maladies aussi graves que la morve.

Enfin le froid, le chaud, les arrêts de transpiration, qui causent aussi d’autres maladies, occasionnent souvent celle qui nous occupe ; ces causes, qui paroissent être indirectes et accessoires, n’en sont pas moins des causes essentielles, qui prouvent que tout ce qui tend à affoiblir les organes respiratoires et le système lymphatique, prédispose à la morve.

Nous le voyons dans l’usage des chevaux du Nord, élevés jusqu’à l’âge de trois ou quatre ans, avec des foins de bas prés, de mauvaise qualité, pendant l’hiver, et abandonnés, l’été, dans des pâtures riches et abondantes. Cette alternative de misère et d’abondance donne lieu à un tempérament très-foible ; il en résulte qu’ils ne sont pas capables de soutenir les mêmes fatigues que les chevaux du Midi, élevés différemment, et nourris au grain et avec des fourrages plus savoureux. Ce qui prouve cette assertion, c’est que la morve n’est guères connue dans le Midi, et qu’on n’y fait pas d’attention à un écoulement par les naseaux, fût-il même accompagné de chancres, et de l’engorgement des glandes lymphatiques de dessous la ganache, accidens qui disparoissent avec de l’exercice et une nourriture fortifiante.

Le vert donné aux chevaux qui ont passé par les autres causes débilitantes, augmente la disposition à cette maladie, et la développe au point de faire périr les chevaux qui en sont atteints. Plus les animaux sont long-temps soumis aux causes déterminantes, plus la maladie s’aggrave et précipite ses effets vers la perte de l’animal.

La morve simple, qui n’affecte que la membrane nasale, ne tue point, mais