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de distinguer le mâle d’avec la femelle : cependant, chez le premier, la peau des paupières est bleue ; elle est rouge chez la femelle.

De la ponte, et de la couvaison des pintades. Le coq pintade peut fournir à six poules, et même à un plus grand nombre ; mais, à cette époque, la barbe est plus rouge ; il crie davantage, et est fort jaloux : les circonstances de son accouplement sont à peu près les mêmes que pour les perdrix ordinaires, excepté que le mâle est très-attaché à sa femelle, qu’il ne la quitte jamais lorsqu’elle pond, et qu’il reste constamment sur le panier jusqu’à ce que l’opération soit terminée.

La pintade dépose ses œufs par-tout où elle se trouve, excepté dans le poulailler : on a beaucoup de peine à la fixer ; on en vient cependant à bout ; mais la femelle et le mâle, qui passent la nuit au milieu des poules, ne sont jamais séparés l’un de l’autre : la femelle aime à pondre à l’aventure, dans les bois, mais de préférence dans les prairies artificielles, et dans les pièces de blé ; sa fécondité est extrême ; sa ponte commence dès les premiers jours de mai et continue jusqu’au mois d’août, pourvu qu’elle ne soit pas gênée ni interrompue pendant le cours de la ponte. Notre collègue Sageret a vu chez lui, à Billancourt, près Sèvres, la pintade faire un grand nombre d’œufs, ne mettre que quelques jours d’intervalle d’une ponte à l’autre : celle de l’automne est à la vérité moins considérable qu’au printemps.

Dès qu’on s’aperçoit que la pintade a choisi pour son nid une luzernière, il faut faire en sorte de lever les œufs, surtout au moment où l’herbe de la prairie est bonne à couper ; car la fauchaison ne manqueroit pas de déranger la couvée, qui alors seroit perdue. Si c’est au contraire une pièce de blé que l’oiseau a préférée, on ne court aucun risque de lui laisser poursuivre sa ponte, parce que l’époque de l’exclusion du pintadeau de la coquille coïncide avec celle de la moisson.

Les sentimens sont partagés, pour savoir si la pintade a réellement soin ou non de sa couvée : le problème est encore à résoudre. Nous avons vu qu’à St-Domingue on ne lui permet pas de couver elle-même ses œufs, par la raison qu’elle ne s’y attache point et qu’elle abandonne souvent ses petits : dans ce cas, il faut donc la faire suppléer par des poules, ou mieux, par des poules d’Inde. Alors, la pintade, devenue libre, perd bientôt le désir de couver pour prendre celui de pondre.

Plusieurs faits cependant sembleroient prouver que des pintades, qui avoient amoncelé leurs œufs dans une luzernière, les ont couvés avec succès ; et M. Sageret que nous aimons toujours à citer, parce qu’il est exact et bon observateur, remarque que mal à propos on a reproché à la pintade de n’avoir qu’un foible attachement pour son nid ; que si elle a réellement ce défaut, il est commun aux autres oiseaux un peu sauvages, quand on les dérange et qu’on les effarouche. Peut-être ne se soucie-t-elle pas de pondre à la maison, dans la vue de soustraire ses œufs à l’indiscrétion des curieux et des malveillans, que son cri et ses coups de bec ne parviennent pas à repousser, quoiqu’elle se laisse difficilement approcher.

Mais il en est autrement dans la basse cour : peut-être ne permet-on pas à la pintade de couver ses œufs, moins à cause de l’indifférence qu’elle montre pour son nid, où elle a été dérangée, que parce qu’elle ne se dispose à les couver que vers la fin d’août, et qu’alors il seroit trop tard dans nos climats pour le succès de l’éducation des petits. Il faut donc, ainsi que nous l’avons déjà dit, recourir de bonne heure aux poules d’Inde, qui s’acquittent parfaitement de cet emploi. Si, au contraire, c’est la pintade elle-même