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refuse presque par-tout l’engrais aux prairies, c’est qu’on y est contraint par la nécessité, et qu’on ne sait pas se procurer tout le fumier qui est nécessaire dans une bonne exploitation.

L’urine des bestiaux est le meilleur engrais qu’on puisse donner ; il est plus actif et plus prompt que celui qu’on obtient avec leurs excrémens. Il est en usage en Suisse, et dans plusieurs autres pays où l’on a reconnu depuis longtemps les bons effets dont il est susceptible.

Le plâtre produit aussi des effets marquans, et il est moins dispendieux que les autres engrais, lorsqu’on est situé à la proximité des lieux où se trouve cette substance minérale.

Nous ne devons pas omettre ici un moyen facile d’améliorer les prairies, dont on fait usage en Lombardie : les cultivateurs ramassent dans les lieux voisins, des terres provenues de détritus de végétaux, ou même des terres franches, et des marnes, qu’ils répandent ensuite sur la superficie du sol. Cette superposition de terre, ou le mélange qui en résulte, donne une grande activité à la végétation, et augmente beaucoup la récolte des fourrages. Les racines qui tracent superficiellement, ainsi que leur collet, se trouvant recouverts d’une petite quantité de terre, reçoivent un amendement qui équivaut en quelque sorte à un butage. D’ailleurs, on sait que les mélanges de terres produisent toujours de bons effets, et que ces effets sont plus durables que ceux des fumiers. L’herbe est plus verte, et elle pousse avec plus de force dans les parties d’une prairie où l’eau des pluies a entraîné la terre des hauteurs voisines. Aussi les cultivateurs du département de la Vienne forment des rigoles pour recevoir les eaux qui souvent charrient, sur les prés, un sable quartzeux, auquel n’est mélangée aucune substance végétale. Ce sable n’est à redouter que lorsqu’il est accompagné de pierres ou de cailloux, ou qu’il s’accumule par couches trop épaisses.

Ce n’est pas ici le lieu de déterminer la proportion qui doit se trouver entre les prairies ou les pâturages d’une exploitation rurale, et les champs labourés et ensemencés chaque année. Cette question ne peut être décidée qu’en connoissant le climat, le sol, les localités, les produits, les besoins, les débouchés, l’état, la situation, etc., etc., d’un bien de campagne. Les circonstances mêmes doivent souvent apporter des modifications d’une année à l’autre. Dans une année, par exemple, où le prix du blé est très-élevé, le cultivateur doit diminuer la quantité des prairies pour augmenter celle des champs en labour, et vice versâ.

L’on voit, par ce court exposé, que cette matière, pour être traitée à fond, demande des détails qui nous mèneroient trop loin. Nous nous contenterons de faire observer qu’en général, dans toute la France, les prairies se trouvent dans une proportion beaucoup trop foible avec les terres en labour ; et que les premières doivent être augmentées en raison de ce que les terres sont d’une qualité plus inférieure : car il est évident que l’amélioration de ces terres ne peut avoir lieu qu’avec beaucoup d’engrais, et par conséquent avec beaucoup de bestiaux, et qu’on ne peut nourrir les animaux sans prairies naturelles ou artificielles. En un mot, les engrais étant la base de toute reproduction, il ne peut y avoir de bonne culture là où les engrais ne sont pas abondans.

S’il est utile pour notre agriculture que le nombre des prairies soit augmenté, il ne l’est pas moins que celles qui existent reçoivent les améliorations dont elles sont susceptibles. C’est pour faciliter aux cultivateurs ces améliorations, que nous donnons ici un tableau renfermant la majeure partie des plantes qui croissent en France. Nous avons