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que les lieux propres à cette chasse sont les prairies, le voisinage de l’eau, ou des champs de blés verts. Il faut de plus observer de ne pas tendre par les vents de nord, ni de nord-est ; et, lorsque tout autre vent règne, il faut disposer ses filets de manière qu’ils versent dans le sens du vent, et non contre sa direction. Ceci une fois entendu, il faudra encore se précautionner de vanneaux vivans pour servir d’appelans, et de pluviers empaillés, ou de figures de pluviers, que l’on appelle des entes. On place les appelans et les moquettes vers le bas de la forme, c’est-à-dire de l’espace que doit couvrir le filet, et un peu en avant. Le bas de la forme est le bout le plus voisin de celui qui fait jouer le filet. On éloigne un peu les appelans des entes ; les vanneaux vivans s’attachent par les pattes à une verge de bois qui joue sur un pivot, et que l’on agite au moyen d’une ficelle, qui correspond à la loge du nappiste. On a de plus un huau ; c’est une verge de bois longue de cinq pieds, armée à une extrémité de deux ailes de buse ou de milan, et de deux grelots d’oiseau de proie. On place cette verge à quatre toises environ derrière la forme ; son extrémité inférieure est attachée, par une corde, entre deux petits piquets plantés en terre : du milieu de la verge parlent deux petites cordes, longues de trois pieds au plus, terminées aussi par deux petits piquets, lesquels, enfoncés en terre de côté et d’autre de la verge de huau, à une distance telle, que les cordes auxquelles ils tiennent ayant encore du jeu, empêchent néanmoins la verge de se renverser tout à fait vers la loge, lorsque le nappiste tire la longue corde attachée près des ailes du huau, et qui va de la jusqu’à sa loge. C’est cette corde qui sert, comme on le voit, à agiter le huau, en l’élevant presque verticalement, autant que le permet l’étendue des petites cordes attachées de chaque côté. Le moment de faire jouer cette machine est lorsque les oiseaux arrivent un peu écartés vers la forme, et volant trop haut. Lorsque les premiers de la bande n’en sont plus qu’à une toise, on élève le huau ; il paroît aux arrivans un oiseau de proie, et ils se précipitent tous vers la terre. Lorsque ce mouvement est fait à propos, on enveloppe toute une bande sous les filets.

Le moment de tendre est le matin avant le jour, pour être prêt à l’heure du rassemblement des pluviers. Le nappiste, caché dans sa loge, qui est une enceinte de branchages piqués en terre, garnie de paille, et placée à quinze ou seize toises de la forme, écoute et regarde, et met toute son attention à découvrir les mouvemens des oiseaux. Lorsqu’il entend quelque chose, il fait jouer soit l’appeau des vanneaux, soit celui des pluviers. Ce dernier est fait du gros os de la cuisse d’une chèvre ou d’un mouton, coupé à la longueur de trois pouces. On l’emplit de cire par un bout à cinq ou six lignes de profondeur, où l’on pratique une ouverture en travers ; on en fait une autre dans la cire qui correspond à celle-ci. Au milieu de l’os, on pratique un trou rond, où l’on puisse ficher à l’aise une petite plume à écrire ; et sur le côté, par rapport à ce trou, on en perce un dernier à peu près double en diamètre, et que l’on ferme et ouvre avec le doigt pour modifier à propos le son du sifflet. Lorsque les oiseaux approchent, il faut en diminuer les sons : plus ils sont voisins de la forme, moins aussi il faut agiter les moquettes, de peur de faire appercevoir le piège. Si les pluviers passoient trop haut par-dessus le filet, il faudroit ne pas risquer de l’abattre inutilement, mais attendre que les vanneaux les aient appelés. Enfin, s’ils s’abattaient trop loin de la forme et qu’on ne pût les faire lever en poussant la voix avec force, il faudroit que le se-